lundi, février 23, 2009

CARS TOON: Entretien avec le réalisateur Victor Navone

Après les longs et courts métrages, voici que Disney*Pixar se lance dans le cartoon, avec leur toute nouvelle série Cars Toon dont nous avons eu la primeur en avant-programme de Volt sur nos écrans.
Sans surprise, l'esprit Pixar est bien là: la qualité impressionnante de l'animation, de la réalisation, l'humour, les clins d'oeil et surtout un coeur gros comme ça!
Il faut dire qu'au volant on retrouve John Lasseter, qu'on ne présente plus, Rob Gibbs (story artist sur Pocahontas, Toy Story 2 et Monstres & Cie) et Victor Navone, que nous avions rencontré à l'occasion de la sortie de l'Oscarisé Wall-E dont il est l'un des animateurs, et que nous retrouvons ici avec bonheur pour parler de ces petits bijous!

Quel est le concept de Cars Toon ?
La série s’appelle Mater’s Tall Tales et raconte en fait les folles aventures que Martin est supposé avec vécu dans le passé !

Cela fut-il compliqué de déplacer des héros typiques de la Route 66 dans des univers totalement différents comme l’Espagne dans El Materdor ou encore le Japon dans Tokyo Mater ?
Non. En fait, c’est même plus facile d’imaginer de nouvelles histoires quand vous placer votre personnage dans un nouvel environnement. Les personnages des Looney Tunes ont eut quelques beaux succès dans ce domaine dans les années 40 et 50.

Vous êtes co-réalisateur de la série. Comment s'est passé le travail avec John Lasseter réalisateur?
C’est toujours génial de travailler avec John. Il amène beaucoup d’énergie et d’amour pour le monde de Cars, et il a toujours des idées originales. Rob Gibbs, également réalisateur de Cars Toon, et moi-même nous sommes occupés de la réalisation au quotidien, depuis le travail sur les détails de l’histoire, jusqu’à l’approbation de la lumière finale. Nous montrions ensuite nos avancées à John chaque semaine pour avoir ses impressions et ses conseils.

A quoi ressemblait une journée sur la série ?
La majeur partie de notre temps à Rob et à moi se partageait en trois moments : réunions de planning, d’organisation de la production et autres trucs casse-pieds / vérification du travail des modeleurs, animateurs, artistes, éclairagistes, etc, / et montage, c'est-à-dire l’assemblage de tous les éléments. J’ai d’ailleurs été surpris de voir le nombre de décisions sur l’histoire et la mise en scène qui peuvent être prises encore à cette étape, en compagnie de notre monteur, Torbin Bullock.


J’imagine que vous avez beaucoup appris de cette première experience de réalisateur pour Pixar.
L’essentiel de mon expérience à Pixar s’était limitée au département animation, ce qui fait que cette nouvelle aventure m’a permis de découvrir tous les autres trésors de Pixar. Et de toute façon, on apprend forcément beaucoup en matière de tournage et de narration quand on travaille avec John Lasseter !

Vous parlez des trésors de Pixar. Comment avez-vous travaillé avec tous ces artistes ?
L’animation chez Pixar est un travail très collaboratif, et nous sommes souvent amenés à montrer nos travaux aux collègues pour avoir leurs avis. Ceci dit, c’est seulement la partie émergée de l’iceberg. Ce fut en effet très intimidant d’avoir à diriger toutes les dimensions de la production. Mais, au final, une fois que j’étais certain de ce que je voulais, ce fut une expérience des plus agréables et qui laissait toujours la place à l’intuition. J’ai aussi eu la chance d’avoir une équipe formidable d’artistes et de techniciens à qui je pouvais déléguer certaines tâches et dont le travail correspondait toujours parfaitement, ou même dépassait, ce que j’attendais d’eux ! Je ne dis pas pour autant que ce ne fut pas stressant ; nous avions des délais très courts et des moyens restreints, mais j’en garde d’excellents souvenirs !

Comment avez-vous constitué votre équipe ? En tant qu’animateur, cela fait comment de diriger ses collègues ?
Le choix des membres de l’équipe fut du ressort de la productrice. Par contre, au départ, ce fut bizarre de diriger mes copains animateurs, mais tout le monde a été génial et j’ai mis un point d’honneur à développer un sens de l’équipe et de la collaboration. Je pense qu’au final tout le monde s’est bien amusé !

Vous parlez de moyens restreints. Quelles sont les différences en termes de production entre un film destiné au cinéma et une série tv ?
En fait, vous avez moins de temps, d’argent et de personnel, mais précisément à cause de ces contraintes, chacun s’investit encore plus et dans encore plus de domaines différents que pour un long-métrage cinéma. Beaucoup de gens ont tenu plusieurs rôles, à commencer par moi. A certains moments, j’étais réalisateur, ou bien animateur superviseur, animateur, artiste, et même voix de personnage (juste pour un court dialogue !)

A combien d’épisodes avez-vous participé ?
Trois.

Quels éléments infographiques issus du film original Cars avez-vous utilisés sur la série ?
Nous avons dû revenir au logiciel que nous avions utilisé sur Cars car la version actuelle ne fonctionne pas avec les anciennes. Nous avons repris pas mal des techniques d’éclairages récemment développées, mais pour le reste, ce fut comme retourner en 2005. Nous avons eu accès à tous les personnages et décors du film, sachant que nous avons également dû construire beaucoup de nouveaux éléments visuels. De même, Martin subit un grand nombre de changements de peinture et de costumes.

Le mixage a été effectué au légendaire Skywalker Ranch. Comment cela s’est-il passé ?
Le Skywalker Ranch est un endroit magnifique ! Ce fut d’autant plus frustrant d’avoir à s’enfermer pour travailler quand on est là-bas ! John, Rob et moi-même avons travaillé en étroite collaboration avec le designer son Tom Myers pour mixer la musique, les dialogues et les effets sonores pour les trois courts métrages. Nous avons également assisté à l’enregistrement de la musique avec le compositeur Bruno Coon, ce qui fut un régal ! Je me suis rendu compte qu’en matière de mixage comme dans beaucoup d’autres choses, le moins c’est le plus. Nous avons passé la plupart du temps à retirer des sons et à simplifier plutôt qu’à ajouter des détails. Si vous avez trop de sons, ils entrent en concurrence avec la musique et vous n’obtenez que du bruit.

Comment votre choix s’est-il porté sur Bruno Coon pour la musique et comment avez-vous travaillé avec lui?
Bruno Coon est tout simplement le monteur son et l’arrangeur de Randy Newman (qui a fait la musique de Cars). Nous regardions ensemble les story reels et lui expliquions les émotions que nous recherchions pour des différentes scènes. Ensuite, il nous envoyait des esquisses de sa musique pour avoir notre avis, et une fois que nous étions satisfaits de ses solutions, nous enregistrions la musique à Skywalker avec un véritable orchestre. Bruno nous a apporté beaucoup de variété dans la musique, du funk des années 70 à des fanfares à la Sousa, en passant par le Flamenco. Toutes les musiques et les thèmes de la série sont originaux.

Un dernier mot sur la série ?
Nous nous sommes beaucoup amusés à la faire. J’espère que vous vous amuserez autant à la regarder !

lundi, février 16, 2009

CONCOURS VOLT, STAR MALGRE LUI: Les gagnants ont été tirés aux sort!

MERCI A TOUS d'avoir participé à notre concours
Media Magic et Walt Disney Records/EMI!
Un email vient d'être envoyé aux heureux gagnants!

A bientôt pour de nouvelles aventures!

samedi, février 14, 2009

VOLT, STAR MALGRE LUI AU CINEMA: Entretien avec l'orchestrateur John Ashton Thomas

Quand on pense "Disney", ce sont de merveilleuses histoires pleines de magie qui vous viennent à l'esprit. Mais aussi des musiques inoubliables. De Carl Stalling à Alan Menken, Disney a toujours su s'associer avec les meilleurs compositeurs, dans la mesure où l'animation demande toujours les partitions les plus élaborées, tant du point de vue de l'expression des émotions, que de la précision (Mickey Mousing). Comme me l'a dit un jour John Debney (Chicken Little), en matière de musique de film, "l'animation est ce qui différencie les hommes des enfants."
Quand on y pense, il semble à ce titre étonnant que Disney n'ait jamais approché le compositeur John Powell pour faire la musique d'un de leurs films… jusqu'à aujourd'hui. Car, après avoir écrit les musiques de L'Âge de Glace 2, Happy Feet, Horton et plus récemment de Kung Fu Panda, John Powell se positionne clairement comme l'un des plus grands spécialistes actuels du genre. Avec Volt, il confirme son expertise, non seulement en matière de musique d'action, mais aussi –et surtout, oserai-je dire- dans son traitement de l'émotion. Parce que Volt n'est pas juste une comédie ou juste un film d'action animé. Comme le disait Walt Disney, "pour chaque éclat de rire, il y a une larme." Et John Powell l'a parfaitement compris.
Pour en parler, nous nous sommes tournés vers l'un des plus proches collaborateurs du –très secret- compositeur, son orchestrateur principal, John Ashton Thomas. Compositeur et musicien à l'expérience très large, il possède une Maîtrise en Ecriture de l'Université de Londres et enseigne à la prestigieuse Royal Academy of Music. Ses pas l'ont conduit tout autant à travers le Royaume Uni qu'aux Etats-Unis.
C'est en 2001 qui commence à travailler avec John Powell, un ancien étudiant, tout comme lui, du Trinity College. C'était sur la comédie Rat Race. Après de nombreuses et fructueuses collaboration, le voici donc sur Volt. Parallèlement à cela, il a travaillé avec un autre grand compositeur de musique de film, John Debney, et notamment (coïncidence!) sur une autre histoire qui a du chien, Hotel for Dogs!
En quoi consiste le travail du principal orchestrateur de John Powell?
Il s'agit de faire en sorte que la musique sonne le mieux possible quand elle est jouée par l'orchestre. Les arrangements de John sont déjà riches de beaucoup de détails quand je les reçois sous forme de fichiers MIDI et mp3 –ce qui est une pratique courant à Hollywood. A partir de là, je crée une partition jouable. Je ne visualise pas le film pendant cette phase, mais parfois, il m'arrive de le voir juste avant. Dans le cas de Volt, j'ai vu la totalité du film avant de l'orchestrer.

Quelle taille d'orchestre une partition de cette importance demande-t-elle?
Trois pupitres de bois, des cuivres (12 cors, 4 trompettes, 6 trombones et un tuba), des cordes (18 premiers violons, 16 deuxièmes violons, 12 altos, 12 violoncelles et 8 contrebasses), plus les percussions.


On sent un contraste important entre les scènes d'actions de la série tv et les séquences de la vraie vie.
Et pourtant, l'orchestre est bien le même! Toute la différence réside dans l'art et la manière d'écrire pour lui!

L'histoire de Volt est en fait un voyage à travers l'Amérique. Comment avez-vous traité cette dimension?
John a parsemé sa partition de références musicales typiques de chaque région. Par exemple, les scènes à New York font appel à des éléments de jazz qui évoquent l'esprit de la ville.

Volt semble se distinguer des dernières partitions de John Powell comme Horton ou Kung Fu Panda par une approche orchestrale plus intime, moins exubérante, en dépit des nombreuses scènes d'action. Qu'en pensez-vous?
Je suis d'accord. C'est une histoire intime à plus d'un titre, et la musique en est le reflet. C'est ainsi que, comparée à Horton par exemple, Volt contient bien moins d'instruments qui sortent de l'ordinaire.

Il y a une magie de la musique d'animation, notamment dans son orchestration qui peut apporter une émotion unique à un personnage et son histoire. Pouvez-vous nous en parler?
La musique apporte une émotion toute particulière à un personnage et à son histoire. Dans ce cadre, l'orchestration, permet à la musique d'être jouée de façon naturelle par les musiciens. Et quand la musique est jouée par un grand nombre de musiciens, alors l'émotion ne peut que passer, à la mesure du talent de ces musiciens. La plupart des non-musiciens que je connais, y-compris des enfants, savent immédiatement faire la différence entre de la musique jouée par de vrais musiciens et un enregistrement réalisé sur ordinateur, et je crois que nous avons suffisamment de choses synthétiques (colorants alimentaires et autres arômes artificiels) dans nos sociétés pour ne pas en rajouter!
La musique vivante, sous toutes ses formes, qu'elle soit enregistrée ou en concert live, nous enrichit. L'idée de la musique de film est d'ajouter de la profondeur émotionnelle à un film, et c'est assurément ce qui se passe avec Volt, auquel la musique de John apporte un véritable supplément d'âme. Je pense notamment à une scène très émouvante où Volt découvre le chien qui le remplace sur le tournage de la série. C'est un moment très triste, et l'utilisation d'une texture de cordes, très simple, incarne parfaitement l'esprit de cette scène.


Comment de temps avez-vous passé à l'enregistrement de la musique de Volt?
Neuf jours en tout, dont six avec l'orchestre. Nous l'avons enregistrée en septembre 2008. Nous avons passé trois jours à l'enregistrement des percussions et six pour l'orchestre. Cela s'est passé au studio de la Fox à Los Angeles. Tout s'est merveilleusement passé grâce au talent considérable de toute l'équipe, à commencer par John, mais aussi l'ingénieur du son Dennis Sands, l'équipe chargé du Pro Tools, tous ces musiciens incroyables, les orchestrateurs, l'équipe de préparation de la partition et le personnel fabuleux de la Fox. Il faut dire que le traiteur était excellent lui aussi et elle s'est vraiment démenée pour nous trouver un thé convenable pour nous, Anglais!

With very special thanks to John Ashton Thomas and Dave Metzger!

lundi, février 09, 2009

VOLT, STAR MALGRE LUI AU CINEMA: Entretien avec l'animateur Cinzia Angelini

Chaque animateur est un monde à part entière, avec une personnalité unique et un caractère unique qu'ils transmettent aux personnages sur lesquels ils travaillent. Plus riche est l'expérience et le vécu de l'animateur, meilleure est l'animation. Dans l'animation et l'art, l'expérience de Cinzia Angelini est un cas d'école au niveau de la diversité et de la richesse. Cela fait quinze ans qu'elle travaille dans l'animation, elle a participé à la plupart des grandes productions du moment, qu'elles soient classiques ou qu'elles fassent intervenir l'animation par ordinateur.
Née à Milan en 1971, Cinzia a suivi sa vocation avec les cours du College of Art and Sciences de Milan. Elle a ensuite suivi la formation du Centro Formazione Professionale per la Tecnica Cinetelevisiva (C.F.P), après laquelle elle a commencé à travailler comme storyboarder et animateur pour les courts métrages TV dans divers studios d'Italie. Parmi ces studios on retrouve Mixfilm, Animandus, La Lanterna Magica et Animation Studio. Cinzia a créé une série de guitares peintes qui furent acclamées par la critique et eurent l'honneur de figurer dans différents magazines de mode italiens. En 1994, elle déménagea à Londres, et travailla sur le film Balto aux studios de Steven Spielberg, Amblimation. Plus tard à Munich, Cinzia travailla comme animatrice pour le Munich Animation Studio, où elle contribua à la production de The Fearless Four.
De retour à Londres en 1996, elle a rejoint Warner Bros comme animateur pour The quest of Camelot. Elle fut embauchée par Dream Works et déménagea à Los Angeles, pour travailler comme animateur sous la supervision de James Baxter sur les films dont Le prince d'Egypte, Eldorado, Spirit l'étalon des Plaines et Sinbad la légende des sept mers. Elle rejoint ensuite Sony Imageworks en 2002 pour la post production de Spiderman 2 (qui gagna l'Oscar des meilleurs effets visuels en 2004), Open Season et fut invitée comme lectrice par l'université d'Hawaï. Elle alla ensuite travailler chez Disney Animation Studios comme animateur superviseur sur Toy Story 3, Bienvenue chez les Robinson et plus récemment Volt.
Elle vie actuellement à Los Angeles avec son mari William et sa fille, tout en continuant à développer des projets personnels comme actuellement "Italy around the corner", une collection de ses œuvres originales de paysages italiens. Elle continue dans son art, avec de la peinture à l'huile sur toile et en acrylique sur acajou. Son travail a été exposé dans de nombreuses expositions internationales, et récemment, la Enisen Gallery of Glendale a présenté ses œuvres tirées du projet "Italy around the corner". Elle prépare aussi de nouveaux projets dans l'animation comme le très attendu Antique Shop.
Très attachée à la qualité de l'animation, elle a permis à Volt d'atteindre le plus haut niveau, caractéristique de la maison de la souris.

Vous êtes passée de Milan à Londres puis de Londres à Los Angeles. Pouvez-vous me parler de cette extraordinaire aventure?
Après avoir travaillé à Milan, pendant environ un an, j'ai eu la chance de travailler chez Amblimation sur le film Balto. C'était une superbe opportunité que de travailler dans un environnement aussi créatif, avec autant de personnes talentueuses. Je me suis beaucoup amusée et j'ai beaucoup appris. C'était comme être libérée de sa cage et envoyée en pleine jungle amazonienne! Après ça, j'ai passé un an à Munich, en travaillant pour Munich Animation, et c'est là que j'ai commencé à animer, puis je suis retournée à Londres pour travailler chez Warner Brothers Animation. Puis en 1996, Dreamwork m'a invité à les rejoindre, comme animateur sur Le Prince d'Egypte. J'ai finalement déménagé pour Los Angeles.

L'Italie reste très présente dans votre travail, spécialement dans votre peinture. Pouvez-vous me parler de l'importance de votre pays sur votre personnalité artistique?
C'est absolument vrai, à la suite de ces quelques années d'animation traditionnelle, j'ai réellement ressenti que j'avais besoin de me concentrer sur quelque chose qui pourrait stimuler ma créativité de différente manières. Comme ma mère est peintre elle-même, le choix de la peinture m'est venu tout naturellement. Les couleurs et les toiles me sont familières depuis mon enfance. L'envie de peindre des scènes de l'Italie est dû au fait que je suis ici depuis quelques années. Ces lieux me manquent et c'est ce qui m'a donné envie de créer "Italy around the corner", un projet avec beaucoup de peinture acrylique peinte sur acajou. Cela va faire un bon moment que je n'ai pas peint, mais je souhaite m'y remettre très bientôt.

Pouvez-vous expliquer votre fascination pour les guitares?
La musique et les instruments ont toujours fait partie de ma vie. J'ai étudié la guitare et un jour j'ai commencé à faire un concept pour un de mes instruments. C'est finalement devenu un travail alors que je continuais mes études. J'en ai vendues beaucoup à des boutiques ou à des collectionneurs privés à Milan. Au début des années 90, mes guitares peintes figuraient souvent dans les séances photos pour les magazines italiens. C'était amusant à faire, et alors que je terminais mes études dans les écoles d'art et d'animation, ça m'a permis de goûter un peu au monde du commerce.

Chez Dreamworks, vous aviez travaillé sous la supervision de James Baxter (Il était une fois). Pouvez-vous me dire comment c'était de travailler avec une telle légende?
L'expérience à DreamWork était fantastique! Pas seulement parce que j'avais l'excitation de rejoindre un tel studio, mais aussi parce que j'avais la chance de travailler avec un animateur aussi génial que James. Il a toujours été très respectueux du travail de chacun, et l'équipe l'admire en retour. Quel que soit le travail que je lui apportais, il me donnait un retour positif, et m'encourageait pour mes gribouillis, comme si on allait arriver à en faire quelque chose. J'ai appris à planifier une scène, à réfléchir aux personnages que j'animais, sur le rythme et les poses. Aux studios on avait toujours l'habitude de dire, "il y a James, puis rien, puis nous autres". Son don en tant qu'animateur est de pouvoir mettre en balance la performance et la technique à la perfection.
J'aimerais vraiment travailler avec lui dans le futur. Ce n'est réellement pas suffisant d'être juste un animateur brillant. Superviser les autres animateurs pour arriver à produire tout le projet avec succès est un talent particulier. Heureusement pour nous, James incarne cet ensemble de talents. Il est capable d'apporter son don artistique et son talent de manager de telle façon que nous en avons été tous émerveillés. Il y a une loyauté intense et une éthique de travail qui découle d'un tel leadership, qui impose le respect autour de lui. On ne pourrait pas faire mieux quand on travaille sur un film.

Pouvez-vous me parler des différents personnages que vous avez animé chez DreamWorks?
Quand j'ai rejoint Dreamworks au départ, j'ai travaillé quelques mois sur le Prince d'Egypte, alors qu'ils terminaient l'animation. C'était géant mais en même temps, c'était un grand défi. C'était la première fois que je devais réaliser un humain réel (Moïse). J'ai eu la grande chance de travailler avec l'animateur superviseur de Moïse, Christophe Serrand.
Le projet suivant fut Eldorado, qui a un style d'animation plus outré. Je suis allé dans l'équipe d'animation de James qui animait Tulio, et puis ensuite j'ai rejoins l'équipe qui travaillait sur Spirit. Avant de commencer Spirit, nous avions eu un long entraînement pour nous apprendre à dessiner et à faire bouger un cheval. Les chevaux sont parmi les animaux les plus complexes à animer. J'ai beaucoup appris sur ce film, spécialement parce que j'ai été beaucoup impliquée dans la recherche et la préparation. Ce n'était pas simple, mais assurément gratifiant une fois terminé.

C'est chez DreamWorks que vous avez commencé à travailler sur l'animation numérique. Comment c'était?
Depuis la sortie de Toy Story, j'ai été très attirée par l'animation par ordinateur. Quand Dreamworks a décidé de faire un essai et de voir comment les animateurs traditionnels pourraient animer sur ordinateur, je fus la première sur la liste! Je crois qu'ils ont pris huit personnes au début de Spirit. Heureusement pour moi j'ai eu deux mois d'entraînement et l'opportunité sur Spirit d'animer à la fois en traditionnel et en numérique. Pour le film qui suivit, Sinbad, j'ai utilisé principalement du numérique pour les sirènes et l'oiseau Roc.

Comment êtes vous passée, chez Sony Imageworks, de l'animation de film à l'animation d'effets visuels?
Après quatre films chez Dreamworks, j'étais prête à bouger et essayer des choses différentes. Bien que ce soit une décision difficile, j'ai décidé de donner une chance au monde des effets visuels. J'ai toujours rêvé de travailler pour Dreamworks, et ce fut donc une séparation déchirante. En même temps j'avais vraiment envie de voir ce qu'il y avait dehors, et j'ai saisi l'opportunité qui se présentait. Imageworks m'a embauchée pour travailler sur Spiderman 2. Ce fut très amusant de travailler avec Anthony LaMolinara qui était directeur de l'animation sur le projet. Il est toujours très protecteur avec ses animateurs, et instille ce qu'il faut pour obtenir un travail d'équipe ce qui a résulté en un oscar.

Quelles sont pour vous les différences entre les effets visuels et un film d'animation?
Maintenant que j'ai travaillé sur des films d'animation et sur des effets visuels, je peux dire qu'il n'y a pas beaucoup de différence entre les deux. Bien sûr, cela dépend du projet et des personnes avec lesquelles vous travaillez. Mais c'est aussi sympathique de travailler des deux cotés. Cela évite de s'ennuyer et permet de mieux stimuler la créativité. Je suis souvent en train de dessiner en combinant l'expérience et les trucs acquis des deux mondes. Peut-être que connaître et savoir qu'on peut faire les deux permet à l'animateur de se sentir plus complet.

Puis vous êtes retournée à l'animation par ordinateur avec "Open Season", Les Rebelles de la Forêt. Comment avez vous approché le monde de la CG, par rapport au monde de l'animation dessinée à la main?
Après Spiderman 2, j'ai été un des premiers animateurs à aller sur Open Season. J'ai passé quelques mois simplement à tester les personnages, travaillant en collaboration avec l'équipe de conception. C'était quelque chose que je n'avais jamais fait aussi longtemps avant. Je crois que la différence principale entre l'animation à la main et l'animation par CG, c'est que dans l'animation traditionnelle, l'animateur contrôle bien plus l'ensemble de l'environnement. Le résultat final sera seulement obtenu grâce à son savoir faire. En CG, l'habileté de l'animateur dépend et doit s'appuyer sur la qualité des calculateurs numériques. Heureusement, les structures en fils de fer s'améliorent de plus en plus, et les animateurs peuvent travailler plus vite avec des "types" plus sophistiqués et flexibles. La plupart du temps, quand on anime en CG, j'ai l'impression que mes mains sont liées. Par conséquent il est parfois difficile d'atteindre ce que j'ai en tête. Heureusement, la technologie derrière les fils de fer s'améliore avec chaque nouveau film. Bientôt, les artistes auront plus de contrôle et les possibilités visuelles seront poussées à leur maximum.
Au fur et à mesure de l'avancement des méthodes, je vois de moins en moins de réelles différences. J'essaie de ne rien minimiser à moins que ce ne soit une prise très complexe. J'ai l'habitude d'intérioriser ce que le personnage doit faire et de le faire en accord avec son caractère. Je pense que l'animation avec la CG est plus facile parce que vous n'avez pas à composer avec le personnage du modèle initial. Mais cela peut aussi être moins enrichissant personnellement. Il y a plus besoin d'un effort d'un groupe pour terminer une prise que dans l'animation traditionnelle.

Vous avez débuté chez Disney avec la première version de Toy Story 3 au studio Circle 7 Animation. Comment avez vous vécu cette expérience?
J'ai eu l'opportunité d'avoir la proposition d'être animateur superviseur pour Toy Story 3 chez Circle7 à Burbank. Le studio était très sympathique, et je l'ai aimé immédiatement. Je me sentais prête à commencer à superviser, et parce que pour une femme c'est une opportunité très difficile à trouver, je ne voulais pas manquer ça!
J'ai donc accepté et j'ai suivi Anthony LaMolinara (Spiderman 2) qui était le directeur de l'animation pour ce projet. Puis le jour où j'ai intégré le studio, Disney a annoncé sa fusion avec Pixar. Ce qui est alors arrivé appartient à l’histoire. J'ai changé de lieu et déménagé dans le bâtiment des films d'animation pour commencer à travailler sur Bienvenue chez les Robinson.

En résumé, vous avez travaillé pour Warner, Amblin, DreamWorks, Sony et Disney. Quelles sont pour vous les différences entre ces studios?
Avec l'introduction de la CG et l'arrivée d'énormes bouleversements dans l'industrie, il est impossible de répertorier rapidement les apports que chaque studio a eu sur mon travail, tout en leur rendant justice. Ce que je peux vous dire rapidement, c'est que j'ai une affection particulière pour Amblimation. Ca a été le premier studio étranger pour lequel j'ai travaillé, et j'ai de très bons souvenirs du temps que j'ai passé là bas. Ce fut le point de départ pour de nombreux grands animateurs de notre époque, et je suis très honorée d'avoir pu faire partie de cette compagnie. Depuis elle a grandi pour devenir Dreamworks, mais la philosophie originelle d'Amblimation a survécu pour créer un des studios d'animation les plus stables aujourd'hui. Kung Fu Panda est un parfait exemple de ce que DreamWorks est devenu en moins d'une décennie. J'aime beaucoup ce film.
Sony aussi a exploré de nouveaux territoires, bien qu'être connue comme un studio d'effets spéciaux apparemment ne permet pas d'obtenir le même respect pour les animateurs par rapport à ceux des autres studios. Un des pièges du monde des effets visuels, c'est que les animateurs ne sont pas regardés avec autant d'attention que ceux qui travaillent dans les studios de films d'animations.
Disney bien sur a été le standard le plus élevé de l'Animation. J'aurais adoré travailler chez Disney à l'age d'or de l'animation. A ma grande surprise, Disney a dû faire face à de nombreux défis, et a dû faire des choix difficiles, incluant le licenciement de nombreuses personnes dans leurs studios. Quelle que soit la raison et quel que soit le lieu, cela a un effet horrible sur le moral. J'espère seulement que les studios regagneront leur place prochainement et seront capable de bénéficier substantiellement de leur réunion avec Pixar.
La philosophie de Pixar est claire, même brillante. Mais mon expérience chez Disney me fait penser que mettre en place cette philosophie a un coût, et pourrait rencontrer des résistances sévères à certains niveaux. Comme le monde de l'animation est petit, les choses peuvent changer de façon dramatique. Peut-être au bon moment, Pixar choisira de restructurer les Disney Studios pour réussir à donner de l'émulation pour faire passer leur approche plus progressive. Cela ne pourra que bénéficier aux studios et à l'industrie toute entière. Je pense que c'est ce qu'ils ont compris chez Pixar.

Vous avez pris part à un des fameux séminaires de Robert McKee sur le scénario. Quelle est l'importance de l'histoire dans votre animation?
J'ai toujours été fascinée par le processus de création d'histoire, et je m'applique à m'améliorer en la matière depuis les quelques dernières années. J'ai adoré les cours de Robert McKee et j'ai fait plusieurs séances avec Bruce Block et d'autres. Connaître le processus de l'histoire est fondamental. Une seule prise de vue peut être une histoire en elle-même. Le mieux est bien sur d'essayer de savoir le plus de choses sur les processus de production et de réalisation d'un film.

Comment êtes vous venue à travailler sur Volt?
Après Bienvenue chez les Robinson, les animateurs ont eu un programme d'entraînement intensif pour se préparer à l'animation de Volt. Chris Williams et Byron Howard étaient occupés à créer ensemble une histoire en un temps record. Une fois que l'animation a débuté nous étions tous dans le même bateau, et nous devions rattraper le temps. N'oubliez pas que la date de sortie ne devait pas changer même si Volt devait devenir un film complètement nouveau par rapport à American Dog. L'histoire était nouvelle, les concepts nouveaux, les modèles nouveaux, et les fils de fer aussi. Je pense que la seule chose qui n'a pas changé a été la superbe art direction de Paul Felix.

John Lasseter s'est beaucoup impliqué dans la production de ce film. Comment ça fonctionnait?
John Lasseter passait la plupart de son temps avec les réalisateurs, pour parfaire l'histoire. Et en voyant le résultat, ils ont fait un superbe travail. Au départ de l'animation, John passait du temps avec les animateurs revoyant leurs tests d’animation et nous donnant des idées sur la façon dont les personnages devaient se comporter. Il nous faisait savoir ce qu'il voulait et ce à quoi devaient ressembler les personnages. C'était intéressant d'être témoin de son approche sur l'ensemble du processus. Byron Howard chapeautait l'animation et était le directeur auprès duquel les animateurs devaient se référer, comme pour l'approbation d'une scène etc. Byron est un créateur d'histoire et un animateur vraiment talentueux et il est capable de juger d'une scène depuis ces deux perspectives.

En quoi a consisté votre travail en tant qu'animateur sur Volt?
J'ai véritablement animé tous les personnages principaux Volt, Mitaine, Rhino et Penny sur différentes séquences. Une des séquences sur lesquelles j'ai travaillé est au tout début de la scène du train, quand Mitaine, juste avant que Volt saute du pont, se rend compte que Volt est en fait un héros de série télévisée.

Quels sont les défis que vous avez eu à relever?
Notre plus grand défi sur Volt était l'emploi du temps démentiel. Le studio a eu vraiment de la chance d'avoir un groupe d'animateur aussi fantastique capable de fournir une telle animation dans un tel contexte de pression. Ceci dit, l'un des plus grands défis pour moi a été d'animer les scènes où Volt et Mitaine sont liés par la laisse. C'était une connexion constante dont il fallait se souvenir entre les deux personnages. C'était à la foi un défi technique et artistique pour tous les départements. Quand le département de l'histoire a présenté la première fois cette idée, nous étions tous choqués car nous savions ce qui nous attendait. Mais le résultat final en vaut la peine ! C'est amusant et très divertissant !

Quelle fut la scène que vous avez le plus apprécié de faire?
C'est la scène du train dont je parlais tout à l’heure. Mitaine tire sur la laisse qui est enroulée autour d'elle, tourne et se met debout sur ses pattes arrière, poussant avec son front d'une façon très humaine. Les points d’animation prévus pour Mitaine ne l'ont jamais été pour qu'elle agisse en tant que bipède, ces mouvements ont donc requis beaucoup de trucages et de compromis. Mais c'est payant, à n'en pas douter !

Est ce que le style visuel fort créé par le directeur artistique Paul Felix a eu une quelconque influence sur votre façon d'animer les personnages?
Je ne dirai pas que le style visuel influence l'animation, mais que la qualité de l'animation est réellement améliorée par rapport aux années précédentes chez Disney Animation Studios.

Effectivement, il y a de quoi être « fan n°1 »!
Disney Animation a finalement retrouvé la qualité de l'animation pour laquelle ils étaient connus. Ceci est du à l'influence directe et positive de Pixar. Volt était vraiment un film comportant de nombreux défis. L'animation devait être divertissante et crédible en même temps. Les personnages étaient stylisés mais devaient bouger de façon dynamique. Le rythme devait alterner entre un film de type "super héro" et une prestation très intime et sentimentale. Etre capable de travailler sur les deux et de les joindre pour obtenir le produit final a été un réel accomplissement. A la fin de notre voyage, je pense que chacun peut être très fier de ce film. Après de si gros efforts de la part de chaque département, et de chaque personne, c'est extrêmement satisfaisant de terminer avec quelque chose de si divertissant. Comme nous le savons tous, malgré tous les efforts de la production, cela n'arrive pas toujours. Je pense que Volt est un grand film.
D'un autre coté, il très regrettable que plus de la moitié de l'équipe d'animation soit partie dès la fin de l'animation de Volt. Comme je l'ai mentionné plus tôt, une fois que le ménage sera fait après Volt, j'espère que Disney sera capable de réintroduire un peu de stabilité dans les studios. Volt a requis un gros effort à tous les niveaux, et c'est un film qui mérite d'être vu. Je crois qu'il aura beaucoup de succès.

Sur quoi travaillez-vous actuellement?
Depuis les quelques derniers mois je travaille chez Warner Bros, où ils produisent cinq courts métrages animés pour la PEPFAR (President’s Emergency Plan for AIDS Relief), un projet gouvernemental. Le directeur est Chris Bailey, les producteurs sont Andrew Egiziano et Aaron Parry (de Main Street Pictures). C'est un projet intense et très rapide, qui pourrait conduire à la production d'un long métrage en 2009. C'est gratifiant d'avoir l'occasion de participer à une cause aussi importante que la bataille contre le VIH. Cette opportunité ne se présente pas tous les jours. Il y a aussi l'espoir que cela indique un nouveau départ pour la Warner Bros Animation Studio, cette fois sur la base de l'animation par ordinateur. L'industrie de l'animation garde toujours espoir que la Warner renouera avec la production de film de haute qualité comme Le Géant de Fer et 1999 par exemple, un de mes films favoris.

En plus de tous vos projets personnels il y a Antique Shop, que vous dirigerez. Réalisateur : est-ce une évolution naturelle pour vous?
J'adore l'animation de personnages intéressants, et des prises de vues, et je l'ai toujours souhaité. Mais oui, assumer le rôle de réalisateur semble comme un "nouveau pas" naturel pour moi. Pourtant, je voulais m'exercer en prenant un projet sur lequel je savais pouvoir mener à bien- un court métrage est le format parfait pour travailler à une échelle plus raisonnable par rapport aux défis de la création d'un film. Je suis très enthousiasmée par ce projet et continuellement inspirée par l'équipe qui a tellement contribué à son développement.
Antique shop (qui est le titre de travail) est un projet personnel qui me passionne, inspiré par l'histoire vraie de l'expérience qu'a subie ma mère encore toute jeune pendant la seconde guerre mondiale en Italie. Nous avons débuté le projet en travaillant après les heures de travail sous la forme d'un "club" avec de nombreux autres collègues de chez Disney. Nous avons créé un environnement très sain de respect et confiance pour l'équipe entière et nous avons eu plus d'une centaine de personne qui sont venus travailler dessus pendant leur temps libre, faisant du projet leur propre projet passionné. Nous avons fait quelques avancées géniales avec ça, mais malheureusement l'emploi du temps de chacun n'était plus coordonné pour continuer en dehors de ce lieu.
Heureusement, j'ai été capable de sécuriser les droits d'antique Shop avant de quitter Disney. Bien que je ne puisse pas entrer dans les détails, nous explorons différentes voix pour développer le projet dans d'autres studios. Je sais que j'ai les droits du projet et je continuerai à le développer comme un court métrage indépendant. En collaboration avec ma productrice, Virginia Perry Smith, et de nombreux artistes de notre équipe originelle, nous cherchons actuellement des fonds et nous développons de nouveaux modèles de production ce qui nous permettra de conduire ce fascinant projet à son terme. Nous attendons le moment de le partager avec vous...

Et ce sera pour nous, un plaisir de vous suivre dans votre nouvelle aventure si prometteuse!


Traduction signée Scrooge!

lundi, février 02, 2009

VOLT, STAR MALGRE LUI AU CINEMA: Entretien avec le character designer Joe Moshier

Qu'est-ce qui rend Yzma aussi inoubliable? Qu'est ce qui fait que vous vous sentez immédiatement de connivence avec un personnage comme Pacha? La réponse pourrait être au premier abord à cause d'une bonne histoire et d'une bonne animation. Mais quand on y réfléchit un peu plus, le premier contact que l'on a avec un personnage animé c'est bien évidemment son design.
Le "character design" est un art à part entière. De son résultat dépend l'attirance et la nature inoubliable d'un personnage, et donc une part essentielle du succès d'un film. C'est bien sur un art délicat, dont le but est de construire un lien convaincant entre ce qui est crédible et ce qui est de l'ordre de la caricature (la base de l'animation), du réalisme et de l'imagination. C'est une tâche ardue s'il en est, de transférer une histoire et une personnalité dans des formes physiques qui feront que le résultat sera intéressant.
C'est ce qui fait le choix d'un character designer si critique lorsque vous mettez en place votre équipe. Mais avec Joe Moshier, il n'y a aucun risque de se tromper: il sait parfaitement comment dessiner un concept convaincant et audacieux!
Un savoir-faire qu'il confirme sur chacune de ses contributions pour la Maison de la Souris, depuis Le Bossu de Notre Dame jusqu'à Kuzco l'empereur Megalo, La ferme se rebelle, Chicken Little, Bienvenue chez les Robinsons, et actuellement le nouveau film d'animation des studios: Volt.


Comment êtes vous devenu un artiste Disney?
Je suis originaire de San Diego. En fait, je me suis intéresse au design assez tôt, vers 12-13 ans. Je pensais que je serais artiste de BD. Je n'avais pas songé réellement à l'animation, n tant que carrière ou même comme option. Je suis allé à l'école appelée "Bell Junior High", et avec un de mes amis (Ricky Nierva) nous avions l'habitude de nous rejoindre pour les exercices de math que nous avions le matin! Maintenant, c'est un fantastique designer chez Pixar, et c'est assez amusant qu'il soit finalement allé chez Pixar et que moi je sois allé chez Disney. Au lycée j'ai poursuivi mes études en Art et un de mes amis m'a indiqué Cal Arts. Pendant que j'étais au lycée, j'ai eu envie de travailler dans l'animation. Je pensais vraiment que j'irai travailler chez Don Bluth. Pour moi, Disney n'était pas aussi important à l'époque contrairement aux studios de Don Bluth. Donc mon but était d'aller y travailler. Mais cet ami m'a parlé de Cal Arts. Il disait que c'était l'école d'art de Disney. Je me suis dit "Quoi?!". Alors, j'ai fait des recherches à ce sujet. Je n'y suis pas immédiatement allé.

Je suis sorti diplômé en 1990, et pendant environ un an et demi, j'ai travaillé dans un studio à San Diego appelé American Film Technology. Au départ c'était une compagnie de colorisation de film (vous savez, vous prenez les vieux films en noirs et blanc sur vous mettez de la couleur sur les images). Mais ils avaient une division "animation" et j'ai fini par devenir animateur sur L'attaque des tomates tueuses un dessin animé diffusé les samedis matin. Lorsque l'émission fut terminée, ils licencièrent plusieurs personnes. Ils n'en gardèrent que peu, et j'ai eu la chance de faire partie de ce peu. Nous animions alors un court métrage. C'était dans le style des films d'horreurs, et c'était écrit par le fameux cartooniste de Playboy Gahan Wilson. Cela s'appelait Dinah. Je suis ensuite allé à Cal Arts de 1992 à 1994. Après la deuxième année je me suis senti prêt à affronter le monde et voir si je pouvais trouver du travail.

J'ai postulé chez Chuck Jones, et j'ai travaillé pour leur studio environ quatre mois après ma sortie de Cal Arts. Chuck Jones était loin d'être aussi présent que vous pourriez le penser. Il était là environ une fois toutes les semaines ou toutes les deux semaines. Maurice Noble était là et je l'ai rencontré. C'est une personne fascinante. Ce fut très profitable pour moi d'avoir une personne telle que lui! Je me sens mal à propos de ce qui suivit, car je pensais rester travailler là comme animateur pour au moins un an quand Disney m'a appelé et demander de venir faire un test pour faire in betweener. Ils m'offrirent le travail en septembre 1994, et j'ai en quelque sorte brisé ma promesse avec les studios Chuck Jones. Je ne me sens pas à l'aise avec cet épisode, mais je pense que mon but ultime était d'aller travailler pour Disney. Et je suis resté chez Disney depuis cette époque!

Comment êtes vous passé de "dessinateur in betweener" à "designer de personnages"?
En fait, mon but en venant à Disney n'était pas du tout d'être designer de personnage. Je voulais être animateur superviseur. A l'école et même chez Chuck Jones, j'ai eu de plus en plus d'empathie pour la conception des personnages. Je voulais simplement aller plus loin et m'entraîner pour arriver à dessiner mes personnages de mieux en mieux. J'ai toujours pensé que c'était les animateurs qui dessinaient leurs propres personnages. Donc je pensais que c'était un talent qu'avait chaque animateur et que je devais ainsi l'aiguiser. En fait j'avais tout faux!
Quand je suis arrivé chez Disney en tant que rought inbetweener, j'ai eu une scène de Kathy Zielinski dans les mains avant d'avoir un bureau! C'était une scène avec Frollo, c'était incroyable! Je me disais que je serais rought inbetweener chez Disney pour peut-être environ deux semaines. A ce moment là, Tony Fucile et James Baxter concevaient tous les personnages. Ils étaient débordés avec cette tâche car il y a de très nombreux personnages à concevoir et ils devaient en plus animer leurs propres personnages. Ils devaient avoir John Ripa pour faire quelques esquisses de design des décors de fond, mais il dû partir sur Pocahontas pour faire de l'animation avec Glen [Keane]. Donc je pense qu'ils se sont rappelé de mon portefolio. De plus, après avoir juste regardé les modèles des personnages, j'avais essayé de les dessiner à ma façon avec mes propres expressions alors que les personnages étaient déjà conçus. J'ai appris plus tard qu'ils avaient regardé sur ma table alors que j'étais parti et qu'ils avaient vu une partie de mes propres model sheets, expressions et poses. C'est amusant!
Donc le jour suivant, ils m'offrirent la chance de concevoir... un pigeon ! Je fut appelé dans le bureau de Tony. James était là et ils parlèrent du style "Hé! Ça te dirait de concevoir un personnage?"? Je répondis "Quoi?" Tony et James me demandent de concevoir un personnage? Bien sur! "Oui, est-ce que tu veux concevoir ce pigeon?" "Oui, quel est sa personnalité?" " Il est juste en train de voler" J'étais très excité. Je suis allé au parc et j'ai dessiné des pigeons et d'autres choses. Je pense que j'ai fais une cinquantaine de poses d'un pigeon sur cette petite feuille de modèle la première fois. J'en faisais trop car j'étais très excité! Ainsi j'ai commencé avec un pigeon, réellement! Puis sur le Bossu, j'ai passé une année ou presque à concevoir de très nombreux personnages secondaires, des gitans, des enfants, ce genre de foule.

Puis vous êtes allé sur Kuzco l'empereur Mégalo. A quel moment de la production êtes vous arrivé?
J'ai vraiment été là presque depuis le début, sur Kingdom of the Sun. A ce moment, Roger Allers était le réalisateur, et il y avait une assez grande équipe d'artistes, incluant des concepteurs de personnages. Je me souviens de Buck Lewis qui a fait une présentation d'un personnage dans lequel j'étais impliqué à quelques personnes qu'ils avaient fait venir de chez Disney TV Animation. Mon Dieu, il semblait que chaque fois que nous devions montrer notre travail, il y avait comme dix à quinze personnes dans la salle pour venir voir. Puis au moment où nous nous sommes dirigés vers Kuzco l'empereur Mégalo, Mark Dindal, qui avait été embauché comme réalisateur, est devenu plus familier avec mon travail et il décida qu'il me voulait moi pour être le concepteur principal des personnages pour cette histoire originale. J'ai créé un style guide de 35 pages pour Kuzco et Kingdom in the Sun, qui racontait comment dessiner les personnages et leur donner de la consistance.

A quel point les nouveaux designs étaient-ils différents des originaux?
Je dirai que Kingdom in the Sun avait un look plus traditionnel, à cause du ton de l'histoire qui était un peu plus sérieux. C'était une histoire de fin du monde, le côté sombre venait et submergeait le personnage mythique qui voulait bloquer le soleil et les gens allaient en mourir. Donc j'avais cette espèce de storyline de destruction massive. Visuellement, Roger, voulait quelque chose de plus crédible pour cette storyline. Donc, Mark Dindal est venu et il a eu cette nouvelle idée délirante. Il est un grand fan des courts métrages de la Warner Bros et il savait que j'étais un grand fan de Milt Kahl et de Ward Kimball. Ainsi quand il m'a demandé de le faire il m'a juste dit "Vas y ". Il était excité à l'idée de changer le look.

Avez-vous l'habitude de travailler en collaboration avec les animateurs superviseurs des personnages que vous créez?
Oui, et vraiment en étroite collaboration sur ce film, spécialement avec les animateurs. Une fois que l'on a une esquisse de design établie, les concepts sont envoyés aux animateurs superviseurs et ils travaillent sur les personnages, les positions principales et les expressions. De temps en temps, ils me retournent un personnage pour faire quelques changements. Par dessus tout, Mark avait envie que tous les personnages semblent dessinés par une seule personne, c'est à dire, fondamentalement, qui proviennent d'un même univers. Donc j'ai travaillé avec Dale Baer sur Yzma. Il a fait un travail vraiment génial. Bruce Smith, le superviseur de Pacha, s'est lui aussi calé très tôt sur le style.

N'avez-vous pas été impliqué dans la suite de ce film King Kronk?
Oui, c'était une faveur. Mark Dindal m'a demandé de développer ce film. J'ai donc fait de nouveaux concept pour Yzma, Kronk et Kuzco. C'était amusant, parce que, de façon stylistique, je pense que j'étais entrain de développer ma sensibilité et de me dépasser. J'ai poussé les personnages plus loin que pour le film, et c'était amusant! Vous savez, c'est l'avantage d'être déjà familier avec les personnages!

Vous avez aussi conçu les personnages du dernier film Disney dessiné à la main actuellement qui est La ferme se rebelle. Pouvez-vous expliquer ce concept très inhabituel, très anguleux, spécialement pour les vaches?
Lorsque j'ai débuté, les deux réalisateurs étaient Mike Gabriel et Mike Giamo. Ils aimaient beaucoup l'animation des années 50 et 60. Leur art directeur était Dave Cutler et il m'a fortement poussé à m'inspirer de cette influence. Il y a beaucoup de références aux anciens dessins animés Disney dans ce film. En tant que designers, nous nous trouvons presque dans une situation type d'un hommage au passé. Nous voulions faire une sorte de célébration de ce qui se faisait dans les années 50 et 60. Pour ce qui est des vaches, je me souviens d'un dessin des trois vaches: très simple, mais les contours de base préparaient la voie au design. Il a été fait par Chris Ure, un story artist, qui est aussi un grand concepteur. C'était fondamentalement des cubes et des rectangles. Ce fut notre point de départ pour construire un design crédible pour les vaches. Mais il y a de nombreux points que je modifierais si j'avais à les dessiner aujourd'hui. Et, quand je les regarde j'ai le sentiment d'avoir beaucoup appris depuis lors.

Quand vous êtes entré dans l'ère de l'animation numérique avec Chicken Little, est-ce que le processus a été différent en matière de conception des personnages?
Oui. Chicken Little a été réellement une expérience enrichissante, un type de film différent. Il y avait bien sûr beaucoup de tensions lors de la conception. Je ne me sentais pas impliqué dans tout, car j'avais ma petite pièce, mon petit coin et je faisais juste mon travail. Je n'ai pas vu l'équipe technique autant que ça.
La création par ordinateur n'a aucun effet sur la conception de mes personnages. Mais une fois que les concepts ont été établis et que nous avons commencé à construire à partir de ça, j'ai réalisé à quel point le processus était différent en réalité. En tant qu'animateur et designer, vous voulez que chaque dessin du personnage soit expressif, avec des gestes intéressants, des lignes d'actions, des poses. Une fois que vous avez finalisé votre concept, vous avez à faire les dessins orthographiques sur lesquels le personnage est complètement mort (dessins de base destinés à être entrés dans l'ordinateur).
C'était très difficile pour moi de comprendre pourquoi après avoir bataillé si longtemps pour donner vie à un personnage, ils voulaient le tuer immédiatement. C'était très dur de voir la personnalité que vous aviez créée sur model sheet dans ces poses désincarnées: bras écartés, jambes écartée, yeux grand ouverts.
Il ne faut pas moins de quatre ou peut-être cinq mois après que le modèle ait été construit pour que vous commenciez à voir les poses et alors, vous voyez des choses que vous avez envie de modifier ou affiner dans le concept et c'est trop tard. Pour être honnête, c'est une expérience d'apprentissage frustrante.


Les maquettes sont des instruments d'aide à la création des personnages. Pouvez-vous me parler de vos relations de travail avec le sculpteur Raffaello Vecchione, avec lequel vous avez collaboré pendant de nombreuses années?
Absolument. Nous nous sommes rencontrés au départ sur Kuzco l'empereur mégalo. Il est absolument fantastique. Il faisait des sculpture de chaque personnage principal de Kuzco et elles étaient fantastiques! J'ai une sculpture d'Yzma. Je la regarde chaque jour et je suis toujours époustouflé devant elle. Il a été animateur. Il est rare de trouver un modeleur ou un sculpteur qui a les mêmes racines, et qui se passionne pour les mêmes choses que moi en tant que designer et animateur. Il pense comme un designer et un animateur et son travail est très complémentaire au mien. Quand il traduit mon concept en 3D, je pense véritablement qu'il améliore la création. Il l'a fait sur Kuzco l'empereur mégalo et sur La ferme se rebelle.
Donc sur Chicken Little, il connaissait déjà mon travail et la façon de traduire mes idées. Raffaelo a eu une part très importante dans la création du personnage 3D pour l'écran. Nous voulions utiliser son talent pour résoudre certains soucis de concept dès le départ, avant de commencer à le construire dans l'ordinateur. Lorsqu'il est venu, il a fait les sculptures de tous les personnages principaux et les bustes de quelques personnages secondaires. En passant les sculptures au scanner, cela nous a permis de construire plus rapidement nos modèle en utilisant les information du scan comme un orthographique visuel.

Bienvenue chez les Robinsons est tiré du livre de William Joyce. Comment avez-vous composé avec cet héritage?
Visuellement, je pense que Steve Anderson, le réalisateur, pensait que pour intéressants qu'ils sont, les personnages dessinés dans le livre n'étaient pas fait pour l'animation. Par exemple, les yeux sont véritablement l'âme des personnages, et dans le livre, les yeux sont trop petits. Vous voulez qu'ils soient expressifs, à moins qu'il ne faille de petits yeux pour un personnage en particulier. Donc il faut être prudent si on veut transformer un de ces dessins en 3D. Donc, Steve m'a demandé de caricaturer ce que William Joyce avait fait pour certains de ses personnages. C'était amusant, parce que la plupart du temps je pars avec une feuille blanche. J'ai juste le storyboard des artistes du storyboard, et les idées. Donc c'était amusant de prendre ce que William Joyce avait déjà fait et perfectionner ce qu'il avait déjà établi en matière de personnages.

Et qu'en est-il de l'homme au chapeau melon?
L'homme au chapeau melon n'est pas un personnage du livre. Donc nous avions bien plus de liberté créative avec cet homme. Au départ, son nom était Morpheus Pink. Pour moi il y avait beaucoup d'importance dans les yeux de l'homme au chapeau melon. Et la cape offre un contraste et contrebalance les jambes d'allumettes. C'est un personnage très amusant.

De quelle façon le design d'un personnage évolue durant le processus de création d'un film?
Par exemple Fish. C'est un personnage que Mark Dindal a toujours très clairement vu et je l'ai développé, j'ai joué avec. Il voulait qu'il ait un casque en forme de cloche de plongée. Mais je voulais qu'il ait un bocal à poisson. C'est un personnage timide, introverti sur le premier jet. Donc il a des possibilités de se réfugier dans le bocal à poisson, et nous avons commencé à explorer ces possibilités, avant que sa personnalité ne change. Mais c'était finalement une idée qui avait le potentiel d'influencer le personnage.



Sur Volt, Rhino n'a pas toujours été ce personnage en forme de grosse patate. C'est mon idée de le créer aussi large et rond, simplement parce que quand j'ai fais des recherches sur les hamsters , j'ai trouvé qu'ils avaient l'habitude de stocker leur nourriture dans le fond de leur bouche. Ils la repoussent dans leurs joues et ils sont très mignons en faisant ça. J'ai donc eu l'idée de caricaturer ça et de lui donner cette image de façon continue. Et Chris [Williams, le réalisateur] a vraiment montré beaucoup d'enthousiasme avec cette idée. C'est si amusant d'avoir cette espèce de boule de poils ronde dans une boule. Il semble plus comique que le simple hamster de base. Alors que j'étais en train de designer Rhino, je pense que j'avais en mémoire l'effet que je ressentais étant enfant en rencontrant Baloo quand on allait à Disneyland. Je me souvenais du sentiment que j'avais de pouvoir rencontrer le personnage en personne. Je souhaitais que les enfants aient des sentiments identiques en rencontrant Rhino au parc: cette grosse fourrure, adorable et que l'on peut embrasser, un personnage qui marque et qui est attachant. Je ne voulais pas que les enfants tournent les talons en le voyant et s'enfuient. Je voulais qu'ils aient envie de l'approcher et pourquoi pas de l'embrasser!
J'ai travaillé avec Clay Kaytis, l'animateur superviseur pour Rhino. C'était un plaisir de travailler si proche avec un de mes meilleurs amis. C'est un animateur extrêmement talentueux. Pour moi, quand je pense au travail sur Volt, je ne peux oublier que c'est en travaillant avec lui que j'ai réussi à rendre Rhino tel qu'il est. C'est mon voisin, donc je le voyais tous les jours travailler sur le design. Il a eu une très grande influence sur moi pour ce film.


En parlant de Volt, à quel moment de la production avez vous été inclus dans l'équipe?
J'ai en fait été embauché sur la deuxième phase. Je travaillais sur Joe Jump et sur Bienvenue chez les Robinsons. A cette époque, Chen-Yi Chang travaillait déjà sur le film. Il avait fait de très nombreux personnages secondaires pour American Dog. C'était la première fois que nous faisions équipe, ce qui a été assez intéressant.

Vous avez mentionné Joe Jump, Pouvez-vous m'en parler?
C'était un projet par Sam Levine, qui est un artiste écrivain. J'ai travaillé sur le projet environ un an. Malheureusement il a été supprimé par John Lasseter.

Comment avez-vous créé un nouveau chien Disney avec Volt?
Très très tôt, Chris Williams disait qu'il voulait que Volt soit un Berger Americain blanc. Il ne voulait pas que ce soit un Pongo avec des oreilles différentes. Donc Chen-Yi et moi avons eu cette information pour le design de Volt. A la base, c'était un Berger Americain adulte. L'histoire était assez similaire. Il était aussi un héros télé, mais la façon dont on l'avait conçu en faisait un chien adulte. Proportionnellement, il avait l'air plus fort, avec un corps plus costaud, et pattes plus longues. Il avait l'air d'un chien qui a du succès et qui est capable d'accomplir tout ce qu'il souhaite. Dans l'histoire, son physique l'empêchait de douter et de s'inquiéter. C'était vraiment le genre de type qui réussit tout le temps. Donc nous avons décidé de faire Volt un peu plus adolescent, c'est pourquoi il est plus court maintenant pour un Berger Americain blanc. Il a l'air d'un type pour qui accomplir une tâche est un plus grand défi à cause de sa taille.
En termes de design, ce qui m'est apparu en premier, ce sont les très longues oreilles pointues. C'est un bon point d'ancrage pour fixer le dessin à partir de là. Puis ça a été très bien d'avoir les animateurs très tôt dans l'équipe parce qu'ils peuvent nous influencer, et savent exactement quoi faire avec les yeux et l'expression. Ils ont joué avec le modèle très tôt. Donc nous avons trouvé des poses et des expressions attirantes très tôt. Nous n'avons pas attendu trop longtemps et il y avait une continuité entre la conception et l'animation cette fois.


Comment avez-vous trouvé le point d'équilibre entre le réalisme et la caricature?
Nous ne voulions certainement pas faire un chien réaliste. Pour moi, j'aime bien les formes caricaturées. J'aime quand il y a beaucoup de contraste. Je ne veux pas perdre le facteur de crédibilité, mais je ne veux pas non plus avoir un personnage qui a l'air d'arriver de la réalité pour atterrir dans l'écran. Chaque personnage doit avoir de la fantaisie. Nous nous sommes rendus compte pour Volt au début, que nous perdions de la crédibilité car au départ son design le représentait avec de plus longues oreilles et des pattes très courtes. C'était quelque chose que j'aimais mais qui n'était pas crédible, et les gens demandaient toujours pourquoi ses oreilles étaient si longues et ses pattes si courtes. On a donc imaginé une sorte de compromis. Nous avons fait venir un véritable Berger Americain aux studios et nous l'avons dessiné avec les animateurs. Nous avons utilisé les formes et contours de base du corps, de la tête et de la queue, mais j'ai finalement caricaturé les proportions de toutes les autres parties.

Comment votre concept de Volt s'est-il intégré avec l'environnement créé par l'art director Paul Felix?
Je n'avais pas eu beaucoup de rapports avec lui lorsque j'ai conçu les personnages. Mais une fois que les concepts ont été établis, Paul devait faire des peintures des personnages dans le but de marier l'aspect des décors de fond et des personnages. Il a fait le pont entre les personnages et les décors. Dans les décors, il n'y a pas beaucoup de formes fantaisistes ou d'asymétrie. Il a fait plus de dessin crédibles réalistes comme pour les formes. J'ai établi simplement des proportions attirantes et intéressantes et des formes et ce fut à Paul Felix d'essayer de les marier avec l'aspect des personnages en utilisant ces textures. Il y a eu bien plus à faire avec le coté technique.


Vous avez aussi conçu Docteur Calico. Quelle a été votre approche pour ce type de méchant?
C'est un personnage sur lequel il est très amusant de travailler. Dès le départ, Chris Williams voulait que le personnage soit du type classique des méchants des James Bond. Physiquement, il voulait que Dr Calico soit petit et mince, mais avec de larges épaules. Il a un œil normal et l'autre est un œil de chat. Pour augmenter le rapport avec le thème du chat, j'ai fait plusieurs concepts dans lesquels ses cheveux ressemblaient à des oreilles de chats dans la silhouette, mais le concept était un peu trop visible sur ce point. Il a aussi une canine qui ressemble à celle d'un chat. Pour autant je ne pense pas qu'on le voie vraiment dans le film.
Mon approche du concept du méchant est la même que pour n'importe quel personnage. J'ai besoin d'identifier des formes et des traits du physique qui permettent de supporter et de représenter la personnalité du personnage.


Avez-vous travaillé sur les autres personnages principaux?
En fait au début, non, j'avais à faire Volt et Rhino et Chen Yi avait Penny et Mitaine. Il avait déjà réalisé les design pour Penny et Mitaine très tôt. Au moment où on a commencé à construire les personnages en 3D, Chen-Yi a décidé de quitter la compagnie pour suivre une autre voie. C'est pour cela que je suis devenu en quelque sorte responsable de tous les personnages principaux. J'ai juste pris ce qu'il avait fait pour Penny et je l'ai utilisé comme base pour donner ce que Chris recherchait. Je n'ai pas vraiment beaucoup changé ce que Chen-Yi avait fait.

Un autre membre important de l'équipe était l'artiste en charge du développement visuel, Jin Kim. Pouvez-vous me parler de lui?
C'est un artiste fantastique. Il a débuté comme animateur. Sur Volt, il prenait mes designs et il explorait les personnages, leur donnant différentes poses, expérimentant les expressions. Il devait faire les orthos pour les poses orthographiques pour les modeleurs. Nous étions si en retard, que je n'avais pas eu le temps de faire les orthos ou de développer beaucoup de poses pour les personnages, parce qu'une fois qu'on avait déterminé le concept final, il fallait immédiatement passer à un autre personnage. Donc lorsque Jin est arrivé, il m'a sauvé la vie! Il est très rapide et très bon. Les modeleurs ont utilisé de nombreuses informations de sa part pour aider à construire les modèles. Ce fut une grande aide pour moi et toute la production!

Votre carte en 3D représentant la chaîne de restaurants de gaufres (Waffle World) à travers les Etats Unis utilisée dans le film est adorable! Comment avez-vous travaillé sur ce concept?
Avec Rhino, c'est ma partie préférée du film! C'était une collaboration très amusante. Très tôt, Mac George avait fait une prise sur un concept entier de la carte. Chris William voulait que cette carte d'enfant ait un coté "petit livre d'or" (Little Golden Book). Vous savez, Mary Blair a peint pour certains livres de cette collection, de même que Martin Provensen, qui est un de mes artistes préféré. Chris savait que j'étais un grand fan de cette collection. J'ai donc eu la tâche de faire la plupart des personnages en icône. Mac George fit de nombreux éléments de décors, comme les différentes constructions et les choses de ce style. D'un point de vue design, c'était comme manger un dessert à la fin d'un grand repas, vous voyez. Il y a énormément de crème fouettée dessus et il n'y a absolument aucune raison de se sentir coupable!



Ce concept me rappelle vos concepts pour "Conduct Happiness!"
Je pense que c'est ma forme de langage! Cela influence tout ce que je fais. Bien sûr cette sensibilité dans le concept ressemble vraiment à ce que moi et mon partenaire Chris Sonnenburg avons établi dans notre propre compagnie.

Pouvez-vous m'en parler?
Bien sur! Moi et trois autres partenaires, Chris Sonnenburg, sa femme et ma fiancée Robyn, avons créé "Conduct Happiness" il y a environ cinq ans. C'est le résultat d'un souhait de base et d'un désir de contrôler nos propres idées et notre art. C'est un plaisir de venir avec des idées et de ne pas avoir à les faire passer au travers d'une chaîne de décision mise en place par d'autres.


Pourquoi "Conduct Happiness"?
J'ai conçu l'ours conducteur habillé comme un conducteur de train. Mon idée était que cet ours faisait en quelque sorte un parcours parmi différentes villes dans son petit train, et apportait de la joie aux enfants, tout comme le Père Noël. Donc il "apporte la joie". Il vient d'un concept pour un vrai T-shirt. C'était un hommage à Ollie Johnson. En fait, nous avions donné à Ollie un petit pin's avec ce personnage ours, et il le portait. C'était très amusant et très agréable.
Maintenant que Volt est terminé, quels sont les autres projets sur lesquels vous travaillez?
Actuellement je pars de chez Disney pour aller chez Dream Works. Mais, pour Disney, je viens juste de finir de travailler sur Prep and Landing. C'est un court métrage pour Noël, qui sortira l'année prochaine, à propos du père Noël, et des elfes. Avant ça j'ai fais quelques travaux sur Rapunzel, j'ai travaillé avec Glen Keane, qui a eu une très très grande influence sur moi. Je suis un grand fan. Il est mon inspiration depuis que je suis au lycée. Donc oui, j'ai eu de la chance de travailler avec Glen. Ce fut véritablement excitant. L'histoire a tellement changé, mais j'ai travaillé sur la belle mère de Rapunzel, "Gothel", sur cette espèce de personnage mauvais "Griffol", sur "Bastion", l'amour de Rapunzel, et sur son chien, un basset hound qui est très amusant à créer! Mais je ne pense pas que les personnages et les concepts resteront dans la nouvelle version de l'histoire. Je pense qu'il y aura bien le personnage de la mère (Gothel) mais je doute réellement qu'il y ait un personnage comme Griffol dans la nouvelle histoire.


Un grand merci à Scrooge pour sa traduction
Concepts de Volt par Joe Moshier: reproduits avec autorisation - tous droits réservés
(c) Disney