mardi, mai 26, 2009

LA FÊTE MAGIQUE DE MICKEY: Entretien avec l'auteur/compositeur de "Mickey's Magical Party Time", Scott Erickson

Toute célébration a son hymne. A Disneyland Paris, ils ont pour titre C'est l'année de toutes les Fêtes (5e anniversaire), 10th anniversary song, ou encore Just like we dreamed it. La Fête Magique de Mickey ne fait pas exception à la tradition et c'est ainsi que le resort a fait appel au compositeur bien connu des parcs Disney Scott Erickson pour écrire et composer Mickey's Magical Party time, un rock plein d'énergie et d'esprit de fête.
Scott connaît bien l'univers de Disney. Il a arrangé de nombreuses chansons pour des suites de classiques comme Mulan II, Tarzan II, Lilo & Stitch II, Winnie L'Ourson et l'Efélant ou encore Bambi II avant de devenir un compositeur récurrent pour Tokyo Disneyland entre autres. Mais sa relation avec Disney est plus profonde encore et remonte à son enfance marquée par le Mickey Mouse Club et le parc Disneyland de Californie. Une passion qui se ressent autant dans sa musique que dans cet entretien.

Quelle fut votre première participation à une musique de parc Disney?
Ce devait être en 1997. Je travaillais avec le producteur Robbie Buchanan et Vasile Sirli l'a appelé pour prendre part à la création de la chanson Dancin' (a catchy rhythm) pour la Parade du Monde Merveilleux de Disney. Vasile est donc venu à Los Angeles pour travailler avec Robbie, et dans la mesure où je travaillais avec Robbie, j'ai fait la connaissance de Vasile! J'étais assistant de production, Robbie était le producteur. Par contre, la première musique que j'ai écrite pour un parc fut Pumpkin Party pour Tokyo Disneyland. C'était il y a cinq ans.

Et en quelques années, vous avez contribué à presque tous les parcs Disney à travers le monde!
J'ai surtout écrit des chansons et des musiques de parades ou de spectacles. C'est vraiment fantastique de travailler pour les parcs Disney. Tout le monde est tellement professionnel et talentueux. On ne fait appel qu'aux musiciens du plus haut niveau, et les metteurs en scène sont tellement créatifs!

Comment en êtes-vous venu à écrire la chanson de la Fête Magique de Mickey, Mickey's Magical Party Time?
C'est une histoire assez amusante. Au départ, Vasile cherchait depuis un certain temps un projet sur lequel nous pourrions travailler ensemble et, l'année dernière, probablement en février ou mars, il m'a appelé pour me demander de lui envoyer quelques chansons dans l'esprit d'Halloween pour éventuellement faire évoluer le répertoire existant. Malheureusement, ce projet n'a pas abouti. Puis, en octobre, il m'a rappelé pour me dire qu'il y avait un tout nouveau spectacle en cours de création et il m'a expliqué en quoi consistait La Fête Magique de Mickey. "Nous aimerions beaucoup que ce soit vous qui en écriviez la chanson!", m'a-t-il dit. Or, il se trouve que, parmi les démos que je lui avais envoyées en début d'année, il y en avait une qui avait beaucoup plu et qui était restée sans utilisation. "Nous adorons cette chanson. Si vous pouviez la modifier et l'adapter à notre spectacle, ce serait formidable!" Dans la mesure où personne n'en possédait les droits, je pouvais en faire ce que je voulais. Et c'est ainsi que, d'une chanson pour Halloween, nous avons créé une chanson pour La Fête Magique de Mickey!

Comment les créateurs de la Fête Magique de Mickey vous ont présenté l'esprit de cette fête afin de pouvoir adapter votre chanson?
En fait, il n'y avait pas besoin de beaucoup changer la musique. Nous avons modifié certaines paroles qui se rapportaient spécifiquement à Halloween pour les rendre plus festives, sur la joie de s'amuser et de participer à cet événement. Par exemple, quand je compose une chanson pour un spectacle, j'essaie de reprendre son titre dans mes paroles, de sorte que la chanson et le spectacle soient vraiment liés.


Comment avez-vous écrit cette chanson?
Son écriture a été assez différente de la façon dont je procède habituellement. Le plus souvent, je compose chez moi, dans mon studio. Mais là, j'étais à Las Vegas en train de produire un album de Noël pour le chanteur Barry Manilow. Nous en étions au mixage. Or, pendant cette opération, le producteur n'a pas grand' chose à faire. Il passe le plus clair de son temps à attendre que l'ingénieur du son fasse son travail. J'étais donc là, prêt à m'ennuyer pendant une semaine et demie. C'est alors que j'ai emprunté un clavier du studio, que j'ai associé deux ordinateurs que j'avais avec moi et que j'ai tout simplement monté mon propre mini studio où j'ai pu composer à loisir. C'est ainsi que, travaillant sur un disque de Noël, j'ai composé une chanson pour Halloween!

Comment avez-vous créé les paroles?
A peu près 2/3 des paroles proviennent de la démo originale, tandis que tout ce qui se référait à Hallowen a été retiré au profit de paroles plus adaptées. Par exemple, Vasile m'a dit qu'il y avait des bannières à l'entrée du parc avec "Bienvenue" écrit dans différentes langues, et il m'a suggéré que ce serait amusant d'incorporer cela d'une façon ou d'une autre dans le spectacle. Ce que j'ai fait. Avec Vasile, ce fut un échange passionnant de bout en bout. Je lui envoyais des propositions, il me disait ce qu'il en pensait, je faisais des modifications puis les lui renvoyais, et ainsi de suite jusqu'à que nous en arrivions à une structure qui nous satisfasse tous les deux.

La Directrice Artistique Kat de Blois était aussi de la partie, je crois.
Absolument. J'ai fait sa connaissance sur ce projet. Elle l'a beaucoup influencé. A cette époque, Vasile travaillait en Roumanie et j'ai donc appelé Kat pour avoir son avis et ses idées, dans la mesure où elle était la Directrice Artistique du spectacle. De plus, elle est américaine, contrairement à Vasile ou au metteur en scène Christophe Leclercq, ce qui fait qu'elle a pu apporter des idées et des images propres à notre langue. Elle m'a beaucoup aidé!

Pouvez-vous nous parler de l'arrangement principal de Mickey's Magical Party Time?
A la base, cette chanson est un rock. Nous avons gardé cette idée, tout en la développant. C'est ainsi, par exemple, que pour lui apporter une dimension émotionnelle, nous avons ajouté des cordes dans le refrain et le second couplet. A l'époque, je travaillais sur des versions promotionnelles de Quand on prie la Bonne Etoile avec un orchestre de Prague, et lors de cette session, j'avais un peu de temps. Cela m'a permis d'enregistrer la partie de cordes de Mickey's Magical Party Time. Nous avons également ajouté des cuivres. Ce sont des instruments typiques de la musique de parc à thèmes, mais nous avons voulu les utiliser d'une façon légèrement plus "pop". Ils apportent plus d'excitation et d'energie. Pour la partie de basse, j'ai fait appel à Lee Sklar, qui est un bassiste très célèbre avec une longue barbe, qui a beaucoup travaillé avec Phil Collins dans les années 80 et qui est un bon ami à moi. J'ai aussi contacté mon guitariste habituel, Tim Pierce, qui joue sur tous mes disques, ainsi que mon batteur, Charlie Morgan, qui se trouve habiter à Nashville. Pour ce faire, je lui ai envoyé ma musique et il a joué la partie de batterie par dessus depuis sa ville, pour ensuite me l'envoyer par internet sous forme de fichier audio. C'est le moment que je préfère dans la production d'une chanson, et celle-ci n'y fait pas exception: enregistrer avec tous ces gens incroyablement talentueux avec qui j'ai le privilège de travailler et pouvoir les admirer dans ce qu'ils font de mieux! Tous ces musiciens et chanteurs: je suis fan! Nous avons fait appel à des artistes du monde entier: Prague, Nashville, Paris…!

Vous avez une formation en percussions. Est-ce que cela influence votre approche du rythme?
En tout premier lieu, j'ai appris le piano à l'âge de cinq ans. Puis, à 11 ans, j'ai commencé à jouer de la batterie. J'ai continué le piano tout en faisant pas mal de percussions dans des orchestres classiques à l'université. Pour cette raison, j'aime beaucoup changer de rythme plusieurs fois au cours de mes chansons. C'est vraiment une extension de mon expérience en tant que batteur et percussionniste.

Êtes-vous d'accord si je vous dis que votre chanson est un mélange des Blues Brothers et de High School Musical?
Tout-à-fait! La franchise High School Musical fait désormais partie de l'identité créative de Disney. Mais j'ajouterais: "avec une touche de musique de parc"! Les parcs Disney ont développé un style identifiable qui leur est propre. Je n'ai fait que l'actualiser.

Qu'en est-il des différents arrangements de votre chanson diffusées dans le parc?
J'ai été surpris de découvrir l'arrangement de Vasile pour orchestre symphonique. Je ne savais pas qu'il y travaillait et ce fut une merveilleuse surprise. J'adore ce qu'il a fait! Quant à la version techno, le remix a été fait à Cleveland par un artiste appelé Tony Miracle. Je lui ai envoyé mes fichiers audio ainsi que le mixage final et il a tout reconstruit à sa manière avec d'autres éléments. J'ai co-produit cette version. Il me faisait part régulièrement de la progression de son travail et je lui faisais mes commentaires, puis je l'envoyais à Vasile qui faisait également ses commentaires. Il n'y a eu besoin que de quelques changements seulement car c'était du beau travail! Nous voulions simplement que cela sonne plus "Disney". La première version qu'il nous avait envoyée n'était pas assez scintillante, pas assez "Disney". C'était trop sombre et nous lui avons simplement rappelé que cette version était destinée à un parc Disney et qu'il fallait donc qu'il y ait de la magie dans son arrangement. Il a donc fait ce qu'il fallait et le résultat est génial!

Vous semblez bien connaître Disney.
Mes premiers souvenirs de musique Disney remontent à la Parade Electrique, à Disneyland en Californie, quand j'avais dix ans. C'était magnifique! Toutes ces lumières, c'était magique, et la musique était fantastique. Imaginez mon émotion quand j'ai fait la connaissance de Jean-Jacques Perrey, son compositeur! J'ai toujours été son plus grand fan! Aussi, j'adore l'animation. J'étais scotché devant les dessins-animés qui passaient à la télévision tous les samedis matins. Vers 10 ans, j'ai acheté The Illusion of Life, le livre des légendaires animateurs Ollie Johnston et Frank Thomas et il n'a jamais quitté ma bibliothèque. C'était génial! Mais mon lien le plus intime avec l'histoire de Disney, c'est que je suis né le jour de la sortie du Livre de la Jungle aux Etats-Unis, le 17 octobre 1967! Dans les années 60 et 70, Disney a produit des disques éducatifs pour les enfants. Je les ai toujours, encadrés dans mon studio: il y a Fun With Music – 30 Favorite Disney songs, Learning to tell time, et Acting Out the ABC's. Puis, quand j'étais au collège, c'était l'époque du lancement du nouveau Mickey Mouse Club. Mon rêve, c'était de devenir un Mouseketeer! Le vendredi, c'était "le Jour de la Découverte", et l'émission était enregistrée à Disneyland-même, à Carnation Plaza. Imaginez mon émotion quand, deux ans plus tard, nous sommes allés visiter le parc et que j'ai pu visiter ce lieu pour de vrai! A la même époque, ils diffusaient encore le Mickey Mouse Club original, et je le regardais également avec assiduité. Par un heureux hasard, Don Grady, l'un des Mouseketeers originaux, est devenu un grand musicien et compositeur de chansons, et nos chemins se sont croisés il y a sept ou huit ans. Nous sommes devenus amis! Alors, vous voyez, Disney et moi, c'est une longue histoire!

J'imagine que vous partagez cela avec vos enfants. Comment vivent-ils d'avoir leur papa compositeur de musique Disney?
C'est fantastique de voir la façon dont ma fille de 6 ans et mon fils de 4 ans vivent cela parce que les chansons qu'ils entendent à la maison sortent à la télévision, au cinéma ou dans les parcs Disney. Peu après ses 4 ans, ma fille a chanté avec un chœur d'enfants pour la musique d'une parade de Princesses Disney que j'avais écrite pour Tokyo. Le parc nous a envoyé la vidéo de cette parade et chaque fois que nous la passons, ma fille se souvient qu'elle a changé avec les Princesses Disney! C'est un rêve éveillé!
Mes enfants sont mon premier public. Quand j'écris une musique, je la leur fais entendre et ils me disent s'ils l'aiment ou la détestent. Et, croyez-moi, ils sont loin de tout aimer, en particulier ma fille. Ce n'est pas un public facile! Pour preuve: j'avais écrit un spectacle d'Halloween pour Tokyo Disneyland et, dans une des chansons, j'ai écrit un passage lors duquel les Princesses Disney dansent autour du château en chantant "La-Dee-Da-Dee-Da". Je la lui ai fait écouter et elle n'a pas paru convaincue. Elle m'a dit: "J'aime bien, sauf une chose: les Princesses Disney ne disent pas 'La-Dee-Da'! Elles disent "La-La-La". Or, il se trouve que j'avais un déjeuner de travail avec le Directeur Artistique de Tokyo Disneyland une semaine après. Je lui en ai parlé et il m'a répondu: "vous savez quoi? Je pense qu'elle a parfaitement raison!" Vous voyez, ma fille est une spécialiste des Princesses Disney!

Un grand merci à Scott Erickson, Vasile Sirli, Aurélie Massin et Magali Arnéodo!
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mercredi, mai 13, 2009

PLACE A LA FÊTE... AVEC MICKEY ET SES AMIS: Entretien avec le metteur en scène Christophe Leclercq

Qui n'a jamais rêvé de faire la fête et de danser avec des personnages Disney ? Ce rêve va devenir bien réel à Disneyland Resort Paris ! En 2009, Mickey organise une fête mémorable, avec un spectacle à 360° sur la nouvelle scène centrale, située au cœur de Main Street, U.S.A. dans le Parc Disneyland® !
À l'occasion des célébrations de La Fête Magique de Mickey, Place à la Fête... avec Mickey et ses Amis est un évènement unique. De Il en faut peu pour être heureux à Tu t'envoles, chaque personnage Disney anime la fête à sa façon et cette ambiance ne fait que s'amplifier pour arriver à son paroxysme avec la chanson symbole des célébrations de Mickey's Magical Party Time! Chacun est invité à chanter, danser et s'amuser.
Alors, place à l'interview... avec le Metteur en Scène Christophe Leclercq, qui nous confie comment il a su créer, avec le talent et le coeur qu'on lui connaît, cette fête pas comme les autres.

Comment avez-vous élaboré Place à la Fête… avec Mickey et ses amis?

Nous savions que nous avions besoin d'une ouverture, un prologue, des interactivités et un final (avec un "play-off" ou sortie de scène). Bref, quatre grands tableaux. A partir de ce moment-là, nous nous sommes penchés sur la manière d'actionner ce spectacle. Avec le nombre de danseurs dont nous disposons, nous nous sommes dits que c'était eux qui allaient arriver en premier sur scène. Puis cela a changé et ce sont maintenant les maîtres de cérémonie qui arrivent sur scène d'abord et qui accueillent les danseurs.


Puis, il fallait un moment magique pour que Mickey apparaisse. Nous avons donc pris le parti d'attendre un peu avant de le faire apparaître par magie, histoire de faire monter la tension et de préparer son arrivée. Voilà pour l'ouverture.


Une fois que notre acteur principal, Mickey, la brigade (les danseurs) et les maîtres de cérémonie étaient réunis sur scène, on était prêt à faire un prologue, un deuxième grand tableau, un "production number" comme on dit. A ce moment-là, nous nous sommes dits qu'il fallait vite inviter les autres Personnages à les rejoindre. En fait, nous nous sommes inspirés du logo de la Fête Magique de Mickey sur lequel on retrouve Mickey, Pluto, Dingo et Donald. Pour cette raison, on s'est dit que ce serait bien que ce soit eux qui rejoignent Mickey en premier. Et à partir de ce moment, on avait quatre Personnages, chacun sur un des quatre satellites de la scène, avec des danseurs et des maîtres de cérémonie: tout était prêt pour inviter le reste de la troupe, c'est à dire tous les autres amis de Mickey, Baloo, Tigrou, Timon, Peter Pan et Wendy. Pour ce faire, nous avons utilisé le "lift", c'est-à-dire l'ascenceur incorporé dans cette scène magique, pour faire monter les Personnages par surprise au centre de la scène. En bref, nous sommes partis d'une construction classique que nous avons enrichie au gré de l'histoire que nous voulions raconter.


Comment avez-vous sélectionné les amis de Mickey qui allaient participer à ce spectacle?

La décision d'avoir Dingo, Donald et Pluto a été prise très vite, comme je vous l'ai dit, pour faire écho au logo de la Fête Magique de Mickey sur scène. Après, le choix des autres Personnages Disney s'est principalement fait autour de la musique. Il fallait que chaque Personnage soit intéressant musicalement. C'est ainsi que Baloo est très apprécié des enfants, et il est très lié à Il en faut peu pour être heureux. De la même façon, pour Timon, avec Hakuna Matata, nous tenions une valeur sûre. Avec Tigrou, nous avions des chansons particulièrement "sautillantes", idéales par rapport à l'énergie et au fun de notre spectacle –alors que les chansons de Winnie l'Ourson sont beaucoup plus tendres. Enfin, j'ai hésité à un moment entre Alice et Peter Pan. Or, sur le parc, on pense souvent aux filles –par rapport aux Princesses Disney-, ce qui fait que je me suis tourné vers un Personnage auquel les garçons pouvaient s'identitifier. Et en l'associant à Wendy, les petites filles n'étaient pas en reste non plus. De plus, j'aime beaucoup l'idée que ces deux Personnages peuvent voler, ce que j'ai representé dans la chorégraphie.



Comme vous le soulignez, la bande-son de Place à la Fête… avec Mickey et ses amis participe vraiment de l'énergie et de l'histoire de ce spectacle. Comment s'est passée votre collaboration avec le Directeur de la Musique Vasile Sirli?

La difficulté est venue du fait que l'écriture du script et l'écriture musicale devaient se faire en parallèle. Nous avons eu de longues discussions autour d'une table à écouter des maquettes afin de trouver une manière convaincante d'actionner le spectacle. Il fallait que qu'il soit très énergique d'un bout à l'autre. C'est la musique, au travers des maquettes de Vasile, qui nous a permis de choisir l'ordre d'intervention des Personnages. Au départ, on devait commencer par Peter Pan et finir par Timon. Mais il était musicalement plus intéressant de commencer avec Baloo et Tigrou et de finir avec Peter Pan. Cela se mariait mieux ainsi avec ce qui vient après, c'est-à-dire le final.



Comment avez-vous reçu la chanson Mickey's Magical Party Time de Scott Erickson, que l'on entend plusieurs fois dans le spectacle?

Au départ, on m'a fait écouter une maquette de Scott et j'ai dit: "c'est ça que je veux! C'est ce dont j'ai besoin pour le spectacle!" A partir de là, la décision a été prise d'engager Scott sur le projet afin qu'il écrive des paroles et transforme sa maquette en une chanson originale. Le résultat est le fruit d'une intense collaboration en direct avec Vasile ainsi qu'avec Kat de Blois, Directrice Artistique.


Pour la première fois, vous avez fait appel à un auteur pour l'écriture du scénario.

En effet, j'ai travaillé avec Paul Scherer, qui est au départ un acteur, comédien, et même un peu chanteur anglais. Il fait beaucoup de voix-off, de courts et longs métrages et il est aussi scénariste. Il m'a beaucoup aidé au niveau de l'échange des idées et de l'écriture/ré-écriture du script chaque fois qu'une nouvelle idée surgissait. C'est toujours très difficile à retranscrire sur le papier une idée que vous avez dans votre tête ou dans votre cœur, et il m'a aidé à rendre claires sur le papier des idées surgies de mon imaginaire. Il a apporté une structure beaucoup plus théâtrale dans l'écriture d'un script, alors que de mon côté, j'ai une approche plus "music-hall", beaucoup plus basée sur la musique. Souvent, il écrivait en anglais et moi je traduisais en français. Ce fut un superbe échange.

Pouvez-vous nous en dire davantage sur cette fameuse scène construite devant le Château de la Belle au Bois Dormant?
Elle a été pensée avant la création du spectacle et mon travail a été d'y intégrer le spectacle. Ce qui importait pour moi, c'était d'avoir les deux "lifts", les deux ascenseurs. Ils étaient simplement envisagés, et j'ai beaucoup insisté pour qu'ils deviennent une réalité. Celui de Mickey était primordial car c'est celui qui apporte de la magie sur scène en permettant à Mickey d'apparaître. Quant au second, qui monte les podiums au centre de la scène, il m'était également nécessaire car tout le script était élaboré autour de cela.

Quelles ont été les implications de cette scène très particulière sur la mise en scène du spectacle?

Le challenge, c'était de créer un spectacle visible à 360°. Quand vous êtes dans un théâtre, il y a toujours un décor, fond de scène, et à gauche et à droite, à cour et à jardin, vous avez des coulisses. Tout cela permet de faire des entrées et des sorties. Là, nous avions le Château comme fond de scène, mais pas de coulisses. A partir du moment où les artistes sont sur scène, ils y restent et il faut toujours les occuper, qu'ils soient actifs pour avoir un visuel toujours intéressant. Et comme les artistes n'ont pas de focus –c'était à dire qu'ils n'ont pas le public "devant eux" comme dans un théâtre classique type Chaparral Theatre ou Vidéopolis, nous avons été obligé d'imaginer nos chorégraphies "en cercle". De fait, nous n'avons pas un mais quatre focus principaux: Main Street, le Château, Discoveryland et Adventureland/Frontierland, en fonction de l'emplacement des satellites –sachant qu'entre les satellites, il peut aussi y avoir des focus. Bref, c'est vraiment du 360°! Il faut tout le temps penser à ce que les Personnages Disney, les danseurs et les maîtres de cérémonie dansent pour tout le monde. Quel que soit l'endroit où le public est placé, il verra toujours quelqu'un de face. Toute l'élaboration de la chorégraphie et de la mise en scène a été conditionnée par cette scène véritablement gigantesque et élargie. Car le principe était d'avoir une grande scène centrale avec de la machinerie, et ces passerelles et ces satellites permettant aux Personnages Disney, danseurs et maîtres de cérémonie d'être plus près du public. Cela nous a demandé beaucoup de réflexion et de scripts. Nous sommes passés par 36 versions différentes. Avec 33 artistes sur scènes, à partir du moment où on bouge une personne, on est obligé d'en bouger 32 autres, car sinon on déséquilibre les formations. Toute la mise en scène est donc basée sur des lignes, des croisements, des chaînes anglaises (des couples en vis-à-vis qui changent de places et reviennent). C'est extraordinairement complexe!


Au départ, comment avez-vous visualisé tous ces déplacements?
Tout a été dessiné à la main sur des plans, une vue aérienne de la scène. Avec la Chorégraphe et Metteur en Scène Junior Françoise Baffioni, nous avons positionné les croix et des ronds pour les danseurs, et des noms pour les Personnages sur ces plans. A partir d'un découpage musical du spectacle, nous avons réalisé un plan pour chaque moment important de la musique. Comme nous voulions que cela bouge tout le temps, en utilisant tout l'espace scénique, nous avons dessiné tous les mouvements à la main. Ce fut un travail de titan!
Cette scène est vraiment impressionnante! Où et comment avez-vous pu répéter? Nous avons répété au Disney Village, dans le Dôme, afin d'avoir un marquage au sol grandeur nature pour éviter les surprises au moment où nous allions passer sur la véritable scène et pouvoir y transposer notre travail. Ce marquage nous a tellement bien aidés qu'au moment de la première répétition sur la scène, ce que nous avions prévu a fonctionné et nous n'avons eu que des ajustements minimes à faire.

Vous évoquiez le fait que le logo de la Fête Magique de Mickey vous a inspiré pour le choix des Personnages. Y a-t-il eu d'autres interactions entre la décoration du parc et votre spectacle?

A un moment, dans le Prologue, il y a un ballet avec des rubans qui jaillissent de la scène et qui virevoltent.

Cette idée m'a été inspirée par un concept de décoration des lampadaires de Main Street finalement abandonné. On retrouve aussi cette idée sur différents logos, y compris celui du Château pour les oreilles de Mickey.


Place à la Fête… avec Mickey et ses amis fait alterner tableaux chorégraphiés et interactivité. Comment avez-vous trouvé le bon équilibre entre les deux?

L'interactivité est un élément très important de la Fête Magique de Mickey. Mais dans le même temps, nous avions une grosse troupe de danseurs sur scène et, avec Françoise, nous nous sommes dits qu'il fallait aussi donner du travail aux danseurs. Voilà pourquoi on retrouve sur scène non seulement des ballets très dansés, très énergiques, mais aussi des chorégraphies beaucoup plus simples pour les danseurs et faciles à réaliser pour le public. On sait que le public européen est relativement "passif", par gêne, par timidité, comparé au public américain. Cela n'empêche pas d'avoir des groupes qui bougent et se mettent à faire la fête avec nous. C'est en me basant sur cette spécificité du public européen que j'ai fait en sorte d'avoir un spectacle qui permet cette interactivité, mais qui dans le même temps est solide et toujours intéressant car très visuel à travers la présence des Personnages sur chaque satellite, les magnifiques costumes, la magie, les chorégraphies, les danseurs et des maîtres de cérémonie qui mettent vraiment le feu!


Quel est votre meilleur souvenir de cette production?
Le jour où toute la troupe est arrivée dans le studio de répétition pour la présentation du concept à partir de dessins, de "boards" et de maquettes (car la musique n'était pas encore prête à l'époque). La rencontre avec tous ces artistes que nous avons auditionnés aux quatre coins du monde. Il faut savoir que nous avons sept nationalités de danseurs: français, anglais, américains, italiens, espagnols, polonais et grecs. Au départ, dans le bureau du casting, nous n'avions que des photos des danseurs et des maîtres de cérémonie et le jour où tout le monde s'est réuni, avec la troupe des Personnages également, ce fut énorme! Il y avait 90 personnes dans le studio et qui ont très bien accueilli le concept du spectacle. Après, les répétitions se sont passées simplement, sans stress. Tout était tellement bien préparé qu'en dépit de la quantité de monde à gérer, ce fut un bonheur!

Un autre grand souvenir fut le jour où la scène a été terminée. C'était un samedi matin. Je ne travaillais pas ce jour-là et j'ai reçu sur mon Blackberry la photo de la scène achevée prise par le Manager de Production. J'ai immédiatement pris ma voiture et j'ai foncé sur le parc parce que je voulais absolument voir cette scène avec le Château derrière. J'avais suivi toute son élaboration et sa construction, mais derrière les palissades. Là, je pouvais enfin voir cet espace ouvert, avec tout le travail de plantation de parterres de pensées, de troènes et autres par le département Landscaping (Espaces Verts). Ce fut un moment très émouvant, et en même temps inquiétant car c'était énorme!


Un peu à la manière de la Bougillumination devenue Bougilllumination Enchantée, est-ce que ce spectacle pourra être adapté aux différentes saisons du parc comme Halloween et Noël?
Rien n'est encore décidé. Par contre, j'ai déjà prévu le fait que Mickey souhaite un joyeux Noël et une bonne année à nos visiteurs pour la saison de Noël. Je songe fortement à un final enchanteur avec toute la troupe pour l'illumination du Château de Cristal, profiter de tous ces artistes pour créer un nouveau tableau pour Noël.

Avec tous nos remerciements à Aurélie Massin et Magali Arnéodo! Photos (c) Disney
Un grand merci également à Scrooge ainsi qu'à dlrpteam pour les photos.

Venez partager vos avis sur le spectacle sur DisneyGazette.

mercredi, mai 06, 2009

SPACE MOUNTAIN - DE LA TERRE A LA LUNE: Entretien avec le compositeur Steve Bramson

"On ne sort pas d'une attraction en sifflant l'architecture", disait l'imagénieur John Hench. Il est vrai que la musique est un peu comme une madeleine de Proust, a fortiori quand cette attraction a cédé sa place à une nouvelle version, comme c'est le cas pour Space Mountain - De la Terre à la Lune devenu depuis Space Mountain - Mission 2.
L’histoire du Space Mountain original du parc parisien commence en fait en 1988, avec la conception d’une véritable «Discovery Mountain » comme seul un visionnaire comme Jules Verne aurait pu en rêver. Devenue depuis « Mont de l’Espace », l’attraction s’est aussi faite plus romantique, parée de l’optimisme et de l’enthousiasme des grands utopistes du 19e et du début du 20e siècle, pour finalement ouvrir ses portes, après maints aléas (notamment l’obligation de diminution de la vitesse des fusées par la commission française de sécurité, avec toutes les implications logistiques qu’on imagine…), le 1er juin 1995.
Revivons ensemble avec émotion cette première aventure intersidérale en compagnie de Steve Bramson (JAG), le compositeur de cette version de l'attraction, visionnaire à plus d'un titre, et de sa musique (à écouter ici).


Comment êtes-vous arrivé sur le projet original Space Mountain : De La Terre A La Lune ?
A l’époque, il y a de cela une dizaine d’années, Disney recherchait un compositeur pour cette attraction et avait contacté un certain nombre de musiciens par lesquels je figurais. J’ai donc auditionné en présentant deux thèmes. Ils ont aimé l’un d’eux et la façon dont je l’avais traité, ce qui fait que j’ai été pris sur cette démo. C’était assez original car il s’agissait d’une audition rémunérée, ce que je n’avais jamais rencontré auparavant.

Sur quel matériel avez-vous réalisé cette démo ?
C’était une version au synthétiseur de ce que j’avais à l’esprit, et tout est parti de là.

Que vous avait demandé WDI ? Sur quoi vous êtes-vous basé pour imaginer cette musique ?
Ils avaient un film du ride en images de synthèse. Ce n’était pas grand-chose, simplement votre point de vue comme si vous étiez dans l’un des véhicules de l’attraction. Il s’agissait d’avoir une idée des mouvements, des montées, des descentes, une vague sensation du déroulement. Ils m’ont également dit que cette version française de Space Mountain serait plus ou moins basée sur le roman de Jules Verne, De La Terre A La Lune, avec un canon, une catapulte, un intérieur sombre et des décors immenses évoquant l’espace. Enfin, ils m’ont parlé de l’ambiance musicale qu’ils souhaitaient, évoquant l’immensité de l’espace, l’émerveillement, l’excitation et le sens de l’aventure qui en découlent. La sensation de vitesse était aussi très importante (c’était l’un des roller coasters les plus rapides jamais créés, qui plus est en intérieur), mais dans une approche à la fois lyrique et mélodique, une certaine légèreté et de l’esprit. Chaque passager devait ressentir cet enthousiasme, ce plaisir et cet ennivrement. La musique devait être épique.

Ce fut certainement une grande première pour vous !
Ce fut en effet ma toute première attraction, ce qui était très impressionnant. Il y avait beaucoup de défis à relever, notamment dans les rapports entre la technologie et la musique dans la mesure où il fallait que cette dernière accompagne au plus près l’expérience du voyageur. D’autant plus que les trains ne voyagent jamais à la même vitesse compte tenu, notamment, du nombre de passagers.

Comment avez-vous résolu ce problème ?
Nous avons découpé la musique du parcours en quatre segments. Des capteurs étaient répartis tout au long du parcours et dès qu’un train passait un capteur, cela envoyait un signal afin de passer au segment suivant de la musique. C’est ainsi que chaque voyage était parfaitement synchronisé. Sinon, on aurait tout le temps eu des décalages. Chaque segment durait une trentaine ou une quarantaine de secondes à la fin desquelles se trouvait la répétition d'un très court motif ou une suspension pour un très court laps de temps. C’était quelque chose de vraiment nouveau à l’époque. Il n’y avait bien que l’attraction Indiana Jones Adventure, aux Etats-Unis, qui faisait appel à des procédés similaires. Je ne sais si Space Mountain fut la première attraction de ce type, mais ce fut en tout cas le tout premier roller coaster de l’histoire à fonctionner avec une musique synchrone. Je me souviens être allé deux fois à Disneyland Paris avant l’ouverture de l’attraction afin de chronométrer chaque segment du parcours. C’était vraiment le seul moyen d’avoir une idée précise de son timing. La première fois, c’était en janvier. J’ai dû faire plus d’une vingtaine de tours d’affilée ! Là, j’ai pu discuter avec les imagénieurs des changements qui devaient avoir lieu pour chacun d’entre eux.

Richard Bellis nous a parlé de difficultés similaires sur Indiana Jones Adventure : il était malade à force de faire l’attraction encore et encore avec son chronomètre !...
Je connais bien Richard, et j’ai moi aussi trouvé cette partie du travail assez difficile car je n’ai jamais été un grand fan des roller coasters. C’est un aspect qui m’avait déjà inquiété au moment de signer pour ce projet ! Je me souviens avoir demandé à des amis comment aborder cette épreuve au mieux avant de la subir ! Les deux premières fois n’ont posé aucun problème. Pour les autres… Mais l’un dans l’autre, ce fut très intéressant. En tout cas, à la fin de la journée, tout était prêt et j’étais blindé ! Puis je suis revenu quelques mois plus tard après avoir composé la musique, avec une maquette au synthétiseur pour d’ultimes réglages (notamment en raison de la diminution de la vitesse des fusées imposée au dernier moment par les autorités pour raisons de sécurité), avant d’enregistrer définitivement avec l’orchestre.

Pouvez-vous nous parler de votre approche de ce parcours mythique ?
J’ai voulu que ma musique épouse au maximum toutes les sensations physiques que l’on éprouve au cours de ce voyage. Cela commence avec ce suspens à l’embarquement, qui précède une chute brutale et inattendue avec l’entrée dans le canon. Puis il y a cette attente fébrile, à la fois excitante et tendue, du décollage, à l’intérieur du fût, qui participe de nos interrogations : qu’allons-nous trouver là-haut ? Vient ensuite ce lancer vertigineux, immédiatement suivi par le noir complet. A ce moment, j’ai voulu une musique dépourvue de toute sensation de poids, qui corresponde à cette chute dans l’inconnu. Tout de suite après, la musique devient plus exaltante, plus amusante : c’est le voyage lui-même, pour lequel je me suis également attaché à suivre musicalement tous les tournants et les changements de direction.

C’est alors qu’on arrive à mi-parcours, en vue de la Lune…
En effet, et on a un peu le même phénomène qu’au départ, en haut du canon. Je me souviens que, pour cette section, les imagénieurs m’avaient dit que, tant que l’on monte vers la Lune, celle-ci semble souriante, calme et paisible. Mais quand on atteint le somment, elle se transforme pour prendre un visage quasi démoniaque. C’est la raison pour laquelle j’ai dû brusquement transformer ma musique et passer de l’exaltation à la frayeur. A partir de ce moment, c’est comme si l’on ne contrôlait plus rien, le voyage devient complètement fou. C’est le bouquet final, avec le retour du thème principal, qui se conclut par l’atterrissage, sous forme de marche, comme on me l’avait demandé. Rien qu’en écoutant la musique, on peut pratiquement ressentir tous les détails du parcours. Ce n’est que plusieurs années après que j’ai eu l’occasion de revenir à Paris et de réembarquer à bord de Space Mountain : De La Terre A La Lune, mais cette fois dans sa version finale, que je n’avais jamais eu l’occasion d’expérimenter auparavant. Ce fut vraiment formidable. Il faut dire que lorsque j'y suis monté la première fois, toutes les lumières étaient éclairées. Difficile de ressentir la même excitation et cette apréhension de l'inconnu que l'on peut avoir dans le noir. Cela m’a fait quelque chose d’entendre ma musique dans sa version acoustique et de voir le plaisir que les gens y prenaient !

Comment avez-vous travaillé avec l'imagénieur en charge du projet, Tim Delaney?
Nous nous sommes rencontrés très tôt et il m'a présenté l'esprit de cette attraction. Il avait des idées très précises et s’est beaucoup impliqué dans la conception musicale. Par exemple, quand je suis venu à Paris, il a tout le temps fait l'attraction avec moi pour me faire partager sa vision en chaque point du parcours, et me montrer où se trouvaient les différentes démarquations, les différentes sections de ce voyage. C'est quelqu'un de de très créatif, qui a su partager différents aspects de l'attraction avec moi. C’est ce qui fait que cette expérience a été parmi les plus intéressantes de ma carrière : elle était très différente de ce que j'ai l'habitude de faire, à savoir de la composition traditionnelle de musique de film. WDI m'a par ailleurs fourni une compilation de musiques de films pour me montrer ce qu'ils recherchaient ou ce qu'ils souhaitaient éviter. A mesure que je progressais, je leur montrais mon travail. A ce stade du processus, ils n'avaient pas envisagé le fait de faire appel à un orchestre live. Mais j'ai réussi à les convaincre qu'en raison de l'atmosphère qu'ils voulaient créer, du type d'attraction et du genre d'expérience qu'ils voulaient susciter, ils devraient le faire. Nous avons donc abouti à l'utilisation d'un orchestre de 50-60 musiciens que nous avons enregistré ici à Los Angeles.

Cela a certes dû vous changer de la musique de film stricto sensu, mais n'y a-t-il pas dans cette fusion entre le mouvement et la musique quelque chose du monde de l'animation, que vous connaissez bien également, dans la mesure où vous avez composé notamment une partie de la musique des TINY TOONS?
Je dirai que je n'ai pas abordé la musique de Space Mountain : De La Terre A La Lune strictement comme une musique d'animation, mais il y a bien quelque chose dans ce sens du timing et du mouvement. J'ajouterais que la réputation de Disney s'est fondée sur l'animation. Cela se ressent dans toutes leurs productions, et notamment sur les parcs, qui sont en fait inpirés des héros et des techniques de l'animation. De ce fait, il y a bien une approche toute disneyenne dans cette musique, comme cela pourrait être le cas dans un film Disney. Il y a ce même esprit à la fois très coloré et scintillant, une juvénilité qui, que ce soit dans l'amusement ou dans la frayeur, vous fait retomber en enfance.

La musique a été enregistrée une dizaine de jours à peine avant l'ouverture de l'attraction. Comment cela s'est-il passé?
Il y a eu quelques problèmes techniques qui ont ralenti le processus et il y a eu des retards, en particulier pour les raisons de sécurité que j’évoquais tout à l’heure. Mais il y a également le fait que Disney ne voulait pas investir de l'argent trop tôt dans l'enregistrement avec de vrais musiciens sachant qu'il pourrait y avoir encore des changements de timing au dernier moment. Ils ont vraiment attendu la dernière minute avant de donner leur feu vert.

A l'opposé de la musique ride proprement dit, on trouve une pièce beaucoup plus calme, The Grandeur Of Space.
Il s'agit de la musique d'attente de l'attraction. Parfois, il s'agit complètement d'une musique originale, mais dans mon cas, il n'y avait de financement que pour une pièce plus courte. J'ai donc écrit environ 12 minutes, basées sur le thème principal, et ils ont comblé avec des musiques de James Horner extraites de ROCKETEER et de KRULL. J'ai conçu cette pièce un peu sur le modèle d'une suite en trois parties qui prendrait ses distances de l'excitation de l'attraction proprement dite pour explorer les autres émotions que l'on peut ressentir lorsqu'on est confronté aux mystères de l'espace. Parmi ces sentiments, il y a bien sûr ce calme, cette paix et cette pureté, puis viennent toutes ces interrogations qui se posent à nous face à l'inconnu, pour finir avec une approche plus humouristique. Je ne sais plus vraiment comment m'est venue cette dernière partie, mais je me souviens avoir recherché un nouveau contraste, avec une impression d'apesanteur. Pour des raisons pratiques, la personne qui a réalisé mon site web a pris quelques libertés et a donné des titres à certains extraits que je voulais y voir figurer. Pour celui-ci, c'était Funny Aliens! Ce titre n'a donc pas vraiment de lien avec l'attraction si ce n'est pas le fait qu'il participe de la dimension comique de ce segment.

Dans cette suite symphonique, comment avez-vous traité le thème mytique de Space Mountain : De La Terre A La Lune?
Certaines parties sont de purs arrangements, mais d'autres jouent plus sur l'idée de motif avec des traitements tantôt harmoniques tantôt par augmentation ou par diminution. C'est une manière, quand vous faites la queue, de s'imprégner de ce thème de façon quasi subliminale avant le départ lui-même.

Au niveau harmonique, on songe très souvent à Claude Debussy.
Il est vrai que j'y ai glissé quelques touches impressionnistes ici et là , mais ce ne fut pas une démarche intellectuelle. Cela fait partie de la spontanéité de l'écriture. Quand je pense "mystère", il y a une partie de la culture collective et une partie de mon éducation qui me poussent à me tourner spontanément vers ce type d'écriture. Cela permet également de ne pas resté cantonné à une approche seulement thématique et d'explorer d'autres couleurs, d'autres paramètres musicaux. Une autre référence que l'on peut relever est assurément LES PLANETES de Gustav Holst. Il aurait été très difficile d'en faire abstraction. Sa vision musicale de l'espace est tellement ancrée dans l'imaginaire collectif. Ces deux styles exprimaient vraiment cette idée d'émerveillement et de questionnement au coeur de l'attraction, notamment cette dimension "irrésolue" de leur musique [dans le sens où on n'y retrouve pas les enchaînements tonaux de base, dominante-tonique, mais que l'harmonie est comme suspendue, sans cadence, sans réellement conclusion].

Est-ce que le fait qu'il s'agissait d'une attraction pour un parc européen, qui plus est inspirée d'une œuvre d'un auteur français, a participé de votre inspiration?
Je dois dire que j'ai plutôt puisé mon inspiration de mon expérience en matière de musiques de film. Ma préoccupation principale a été de transmettre les sentiments qu'on me demandait d'exprimer, compte tenu de toutes les difficultés techniques liées à cette attraction. Mais si l'inspiration de la musique européenne ne fut pas délibérée, vous avez néanmoins remarqué que Claude Debussy s'est vite imposé, spontanément, inconsciemment…

Est-ce vous qui avez orchestré votre musique?
Oui. Je l'ai également dirigée. C'est ce que je fais la plupart du temps avec mes musiques. La partition du parcours a été enregistrée avec click alors que les autres pièces l'ont été plus librement. J'avais exactement en tête le tempo que je voulais leur imprimer.

Il est particulièrement intéressant de noter qu'en dépit du fait qu'il ne s'agit que d'un orchestre "moyen" de 60 musiciens, on a vraiment l'impression d'entendre un ensemble presque deux fois plus important…Nous avons bénéficié d'un orchestre remarquable et d'une équipe technique fantastique –chez Paramount, je crois- qui savait exactement comment tirer le meilleur de cet ensemble. Imaginez qu'on a enregistré toutes les musiques de l'attraction en 3 heures seulement, en accordant le plus de temps à la musique du parcours lui-même. Le fait est que j'essaie toujours d'exploiter au maximum le matériel dont je dispose. Prenez JAG. C'est l'une des dernières séries à faire appel à un vrai orchestre chaque semaine. A chaque fois, je dispose de 35 musiciens, parfois 40, et mon challenge, c'est de les faire sonner de la manière la plus riche et la plus opulente possible.

Quels sentiments vous inspirent la transformation qu'a subi votre Space Mountain ?
A l'époque, il y a donc une quinzaine d'années, Space Mountain : De La Terre A La Lune était vraiment une attraction révolutionnaire. Elle a ouvert la voie à d'autres roller coasters avec musique live et synchrone, c'est à dire avec un véritable budget dévolu à la musique, que ce soit Indiana Jones Adventure ou plus récemment The Mummy à Universal Studios. On ne peut que s'en réjouir et espérer que ce mariage entre la technique et la musique se fasse de plus en plus fluide et intéressant, un formidable mariage entre technologie et tradition. De plus, elle a marqué un tournant dans la vie du parc Disneyland Paris, puisqu'elle a permis de le remettre sur pied financièrement. Je suis vraiment fier et honoré d'avoir été choisi pour y participer et, si j'en juge par les emails que je reçois toujours, me disant que c'est leur musique préférée, je suis aussi très fier de ce que j'ai fait. Cela me fait quelque chose de savoir que j'ai participé à donner tant d'émotions à tant de gens si loin de chez moi. Cela signifie beaucoup pour moi et j'en garde un souvenir unique. Depuis, la concurrence et la surenchère n'ont cessé de croître parmi les roller coasters et on peut comprendre le désir de Disney de moderniser cette attraction. Ce fut une surprise pour moi d'apprendre qu'on ne pourra plus entendre ma musique à Paris, mais ce genre de chose arrive très souvent dans ce métier. J'ai une sensation un peu douce-amère, mais il n'y a rien de personnel là-dedans. C'était sans doute le bon moment pour un changement. D'autant plus que la musique collait tellement au parcours que la moindre transformation avait pour conséquence qu'il fallait vraiment tout refaire. Et vu que l'esprit de l'attraction va changer, on peut comprendre qu'ils aient cherché quelqu'un d'autre pour en composer la bande-son. Je ne connais pas Michael Giacchino personnellement, mais je connais son travail. Je suis sûr qu'il a fait quelque chose de formidable…


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