vendredi, décembre 02, 2011

CARS 2 EN VIDEO : Entretien avec le superviseur de l'animation Victor Navone


Pouvez-vous me parler de vos souvenirs à propos du premier film Cars et de ce que vous avez ressenti lorsque vous avez été affecté sur Cars 2?

J'ai travaillé sur le premier film cars il y a plus de 6 ans et ma mémoire de cette époque est un peu brumeuse. C'était ma première expérience de travail avec John Lasseter en tant que directeur, et je me suis senti très chanceux, non seulement parce qu'il est très amusant de travailler pour lui, mais aussi parce que nous avons tous pensé que ce serait le dernier film qu'il dirigerait. J'ai toujours aimé l'animation de personnages simplifiés, et donc la façon de travailler sur Cars m'est venue tout naturellement, et j'ai rapidement été conquis par ces personnages. A cause de ça, j'ai aussi fini d'animer le court métrage sur Martin et la Lumière fantôme pour le DVD de Cars, et à côté, j'ai dirigé une publicité basée sur l'univers de Cars pour une assurance automobile, et en 2008 j'ai co-réalisé quatre Cars-toons pour le cinéma et la télévision. Inutile de dire, qu'après tout cela, j'avais un peu assez des Cars et que j'avais besoin de faire une pause. Je suis revenu à l'animation sur Toy Story 3. Mais une fois que Cars 2 a commencé à monter en puissance, j'ai pensé que ce serait une bonne occasion pour moi de prendre un nouveau rôle de leadership, j'ai donc demandé à devenir directeur de l'animation sur le film. Quand je suis arrivé nous ne savions pas que John Lasseter choisirait de diriger à nouveau; ce qui a ajouté une belle happy end à mes six ans de voyages en Voitures.


Est-ce que l'évolution de la technologie depuis Cars vous a aidé dans l'animation Cars 2?

Pour la plupart du temps, nous avons utilisé les mêmes plates-formes et technologies et d'animation que nous avions sur Cars, simplement beaucoup plus redéfinies et stabilisées. Notre logiciel a, bien sûr, progressé au fil des ans, nous permettant une interaction plus rapide et un playback de nos scènes. Tout cela a été vraiment utile, car l'évolution a permis aux animateurs ayant l'expérience sur le premier film Cars d'augmenter rapidement la production d'un grand nombre de scènes. Nous avions un planning très serré sur cette production, que nous avons pu suivre en grande partie grâce au maillage fil de fer simple et cohérent des personnages. Les plus grands défis ont été pour le département des effets, qui avait à traiter les images avec les océans, les explosions, la fumée, etc.

Quelles sont vos scènes préférées parmi toutes celles que vous avez animés dans Cars 2?

J'aime animer Martin parce qu'il est l'un des personnages plus complexes et, heureusement, j'ai eu l'occasion de faire beaucoup de scènes avec lui. Mon passage préféré est probablement la scène où il fait semblant de faire du karaté à l'aéroport de Tokyo, parce qu'il est très physique et cartoonesque – ce n'est pas quelque chose que nous avons beaucoup l'occasion de faire avec des voitures comme personnages. Ce fut l'une des premières séquences que nous avons animés, et j'ai essayé de montrer aux autres animateurs jusqu'où nous pouvions pousser les choses. Plus tard, Andrew Coats a animé une scène de combats de Martin à Londres qui était encore plus importante, ce qui a fait passer ma scène pour fade en comparaison!

Quels étaient les défis de ce nouveau film, d'un point de vue de l'animation?

Le plus grand défi a été de définir les nouveaux personnages, tels que Finn McMissile et Holley Shiftwell, et d'obtenir des visages attrayants, et des expressions faciales cohérentes. Nous avons fait beaucoup de recherches et de tests d'animation avec ces personnages, et nous avons construit de nombreuses feuilles de modèle que les autres animateurs devaient utiliser comme référence. Nous avons passé beaucoup de temps à éduquer les animateurs qui étaient nouveaux dans l'univers de "Cars" afin de s'assurer qu'ils avaient compris les "règles" du monde et notre façon d'aborder l'animation des voitures. Il y avait aussi un défi au niveau de l'échelle, car il y a énormément de personnages dans ce film, y compris des foules en arrière plan.

Les animateurs sont des acteurs avec des crayons ( y compris numériques). Quelle est votre relation avec les personnages, est-ce que vous "devenez" les personnages?

En tant qu'acteurs, nous essayons toujours d'"entrer dans la tête" de nos personnages, et ça aide si nous pouvons personnellement nous identifier en eux. Nous regardons aussi beaucoup de films de référence avec acteurs réels, à la fois de l'acteur qui fera la voix des personnages et d'autres acteurs qui jouent un type de personnage similaire au notre. Chaque animateur a des approches différentes de son travail, et nous avons tous des sensibilités différentes et des préférences pour chaque sorte de performances que nous aimons. Certains animateurs excellent dans des spectacles comiques, tandis que d'autres préfèrent le plus grave, ou des scènes subtiles. Je suis un peu dans le milieu; j'aime avoir de la variété. J'ai passé tellement de temps sur l'animation de Martin que je sens que je le connais bien et je suis à l'aise pour l'animer dans à peu près n'importe quelle situation. Je ne m'identifie pas nécessairement à lui, mais je pense avoir une bonne connaissance de sa nature, qui est un croisement entre l'innocence et les fanfaronnades. Une sorte de chiot fou qui a rencontré un gros Elvis.

Pensez-vous que les personnages du premier opus ont évolué dans la suite?

La plupart des personnages du premier film restent tels qu'ils étaient lorsque nous les avons rencontrés. L'exception serait Flash McQueen, qui a un caractère qui a énormément évolué dans le premier film. Ainsi, dans Cars 2, nous avons dû trouver le bon équilibre entre la confiance arrogante qu'il possède, tempérée par la compassion qu'il a maintenant pour ses amis de Radiator Springs. Je pense que l'introduction d'un concurrent encore plus arrogant (Francesco, la voiture de course formule 1 italienne) m'a vraiment aidé à faire ressortir le coté ludique de la compétitivité pour McQueen ce qui le rend agréable à regarder.

Quel genre d'impact la voix d'un personnage peut-elle avoir sur votre animation?

Les performances des acteur de la voix ont une énorme influence sur notre animation. Ils nous en disent beaucoup sur le timing, et le ton de ce que la performance physique devrait être. Animer sur une lecture médiocre peut être un combat, car l'animateur doit s'escrimer à ajouter du divertissement alors qu'il n'y a rien derrière pour le porter. Heureusement, nous avions des acteurs vocaux fantastique sur ce film, dont Michael Caine qui a apporté une réelle richesse pour le personnage de Finn McMissile. Lorsque vous démarrez avec un enregistrement de la voix vraiment amusant et nuancé il est plus facile de planifier votre tournage, vous vous sentez comme devoir simplement ajouter quelque chose sur ce qui fonctionne déjà. Le défi devient alors de trouver les sous entendus et d'ajouter des détails supplémentaires qui appuient ou complètent le dialogue.

Comment avez-vous préparé votre animation sur Cars 2?

Je dois avouer que je n'ai pas vraiment observé Cars. J'ai vu le film de nombreuses fois, et j'ai passé tellement de temps dans l'univers de Cars que je n'ai pas ressenti le besoin de regarder en arrière. J'ai préparé un grand nombre de matériels de formation, comme les feuilles de modèle et de démonstration, pour les nouveaux animateurs, ce qui m'a aidé à solidifier et à articuler ma compréhension des "règles" du monde Cars. De là, il était vraiment excitant de voir ce que les nouveaux animateurs ferait avec ces personnages, et ça m'a inspiré pour essayer de nouvelles choses aussi. Les animateurs de supervision, le directeur et moi même, avons discuté des choses que nous voulions faire différemment du premier film. Par exemple, nous avons voulu réduire un peu la façon dont nous avions animé le "front" sur les voitures, et nous ne voulions pas voir beaucoup de mouvement dans le filtre à air/nez de Martin.


Que ce soit des voitures, ou Wall-E, ou Le Monde de Nemo, ou Cars, vous avez beaucoup travaillé sur les personnages limités. Est-ce un choix délibéré de votre part?


J'aime animer toutes sortes de personnages, mais je gravite toujours autour de ceux qui sont limités au point de vue possibilité d'animation. J'aime le défi de travailler avec des limitations si nombreux et d'essayer de trouver des solutions créatives pour transmettre la pensée et l'émotion. J'aime aussi quand je peux produire des animations plus rapidement avec un personnage simple, qui me donne plus de temps pour expérimenter. Quant à l'expression des sentiments, nous nous appuyons sur les mêmes techniques pour les personnages simples ou pour les personnages complexes: le timing, la pose et la caricature. Vous n'avez pas besoin de personnages complexes pour dépeindre des émotions complexes. Les Muppets l'ont prouvé à de nombreuses reprises.

Vous avez travaillé 10 semaines complètes sur Cars 2. Comment gardez-vous votre enthousiasme intact tous les jours, à chaque fois, quand on travaille d'une façon si intensive?

En fait j'ai travaillé sur le film pendant environ 15 mois, bien que près de 50% du film a été animé en 10 semaines. Le calendrier a été très difficile et je n'étais pas toujours enthousiaste, mais travailler avec tant de grands personnages m'a aidé à garder un bon moral. Les animateurs superviseur et directeurs ont travaillé dur pour apporter un esprit de collaboration sur ce film, et de donner aux animateurs un plus grand sentiment d'appartenance. Cela a vraiment remonté le moral et a rendu le travail plus amusant. Les animateurs nous ont à leur tour inspiré et donné de l'énergie avec leur travail créatif. L'arrivée de John Lasseter à bord pour diriger, a permis de concentrer encore plus d'énergie sur le film et à nous pousser vers la ligne d'arrivée. C'est un leader très inspirant qui sait insuffler juste ce qu'il faut pour qu'on puisse développer une idée.

Vous avez travaillé aux côtés de John Lasseter sur les Cars Toons. Comment avez-vous travaillé avec lui sur ce qui est actuellement son dernier long métrage?
Très bien, je pense! Je suis assez à l'aise de travailler avec John actuellement, et je pense qu'il respecte mes apports et fait confiance à ma sensibilité. Le grand défi était que John a été très occupé dans d'autres départements pour une grande partie du film et donc nous n'avions pas autant de temps avec lui que nous l'aurions voulu pour l'animation. Souvent, il revoyait sur son iPad pendant son heure de trajet pour se rendre au travail, les scènes tournées précédemment, et ses notes vocales enregistrées étaient transmises aux animateurs. D'autres fois, les directeurs approuvaient à sa place, et il regardait les scènes plus tard. John nous a toujours fait confiance pour suivre sa vision et maintenir la qualité du film en son absence.

Quel genre de réalisateur est John Lasseter?

John est très collaboratif, et bien qu'il sache ce qu'il veut, il est également ouvert aux idées des autres. Il nous permettait de briser les règles de l'animation que nous avions mises en place, sil estimait que ça fonctionnerait mieux pour une scène spécifique. Malheureusement je n'ai pas à l'esprit de bonnes anecdotes qui illustreraient ce propos ...

John Lasseter dirige aujourd'hui à la fois Pixar et Disney Animation Studios. En tant qu'animateur Pixar, vous est-il déjà arrivé d'entrer en contact avec les animateurs de Disney?

Il y a très peu d'interaction entre les deux studios. Nous avons été chanceux d'avoir quelques-uns des animateurs de Raiponce venir faire une présentation sur les techniques qu'ils utilisaient sur ce film, mais autrement, nous avons tendance à rester assez séparés.

Que faites-vous actuellement?
Je vais commencer la pré-production d'un film pas encore annoncé et je suis très excité!

Merci à Scrooge pour sa traduction!