mercredi, octobre 06, 2010

TARAM ET LE CHAUDRON MAGIQUE EN VIDEO: Entretien avec le producteur Joe Hale


Comment êtes-vous passé du layout à l'écriture de scénario puis à la production de Taram et le Chaudron Magique?
Au départ, j'ai commencé en faisant le courrier au studio. Puis je me suis mis à l'animation. J'ai notamment participé à Man and the Moon et à des courts-métrages pour la télévision. J'ai fait un peu de tout, y compris de l'écriture. A la base, j'étais un « layout man », mais sur The Wonderful World of Disney et Walt Disney's Wonderful World of Color, je me suis pris de passion pour l'association de l'animation et des prises de vue réelles. Le genre de scènes où vous voyiez Walt avec le Pr. Owl, Donald ou encore Tic & Tac. J'ai donc commencé à faire une sorte d'aller-retour entre l'animation et les prises de vue réelles. En tant qu'auteur, j'ai travaillé sur des films comme The Watcher in the Woods. Après cette expérience, on m'a donné à choisir entre la réalisation et l'écriture. At cette époque, Rick Rich était déjà le réalisateur du studio, une sorte d'apprenti réalisateur et je ne voulais pas lui faire obstacle. Je suis donc resté au département Histoire. Vous savez, à cette époque, il y avait pas mal de problèmes au studio. Les Nine Old Men comme on les appelait, Frank & Ollie, Milt et les autres étaient partis, tandis qu'un autre groupe d'animateurs de grand talent avaient rejoint Don Bluth. Il nous restait des animateurs fraîchement sortis de Cal Arts, plein de talent mais sans expérience, et tout le monde savait que j'aimais bien m'occuper des jeunes. Ron Miller m'a donc appelé et m'a demandé de prendre la place de producteur de Taram et le Chaudron Magique. Je pense que certains animateurs lui avaient parlé de moi à ce propos, mais je ne voulais pas le faire parce que Art Stevens, un bon ami à moi, était déjà producteur. Cela ne me semblait pas correct. De plus, à cette époque, je m'intéressait davantage au cinéma en prises de vue réelles et j'ai plutôt demandé à Ron un poste de réalisateur 2e équipe. Au final, il m'a dit que, quelle que soit ma décision, Art serait remplacé par quelqu'un. Et c'est ainsi que je suis devenu le producteur de Taram et le Chaudron Magique,


Quelles furent les difficultés que vous avez rencontrées au moment d'écrire l'histoire?
Imaginez que les Chroniques de Prydain font cinq volumes! Le Studio avait déjà passé 7 ou 8 ans avant que j'arrive sur cette adaptation sans trouver de solution. Beaucoup de storyboards ont été faits puis défaits l'un après l'autre. Pour moi, le plus important était de donner une consistance à l'ensemble, et c'est ce que, je crois, je suis parvenu à faire.

Taram et le Chaudron Magique a été tourné en 70mm. Cela a-t-il rendu les choses plus difficiles?
Ce ne fut pas si compliqué parce que nous avions déjà tourné des films en Cinemascope. Le vrai problème vient du fait que cela demande beaucoup plus d'animation et des décors beaucoup plus grands. Je dirai donc que ce fut un problème plus grand pour l'animation que pour le layout.

On connaît mal l'importance du layout dans le processus d'animation. Pouvez-vous nous en parler?
Disney a toujours eu d'excellents animateurs. Il y avait les Nine Old Men et d'autres. Ce qui représentait environ une trentaine d'artistes. Moi, je ne voulais pas être animateur. J'ai donc demandé à mon supérieur, Andy Engman, à être muté au Layout. Le layout man reprend le storyboard et le segmente en scènes individuelles. Puis, vous dessinez cette scène complètement, décor et personnages. En cela, vous travaillez très étroitement avec le réalisateur et vous avez beaucoup d'influence sur le film. Sur Taram et le Chaudron Magique, dans la mesure où j'avais été un Layout man, j'ai apporté beaucoup de soin à cet aspect. C'est un film sur le layout! Je voulais vraiment que le public ait la sensation du monde dans lequel il pénètre dès le début du film. Nous avons abordé le layout dans ce film de la même manière que lorsque Walt était là: il envisageait chaque scène comme tableau qu'on pourrait extraire du film et encadrer, Nous avons donc fait en sorte que chaque scène soit attirante. Le Layout man est comme un réalisateur. C'est une sorte d'assistant réalisateur doublé d'un directeur artistique. Vous voyez Layout dans le générique des dessins-animés, mais personne ne sait vraiment à quoi cela correspond. Les Layout men sont les héros de l'ombre de l'animation parce que personne ne sait ce que nous faisons! Quand vous regardez une scène colorisée à l'écran, vous vous dites: « quel belle peinture !» Les décorateurs remportent pratiquement tous les honneurs, mais le design est vraiment fait par les Layout men, avec simplement un crayon à papier, pour un rendu en noir et blanc que devront suivre, ensuite, l'animateur et le décorateur....

On doit le style graphique de Taram et le Chaudron Magique pour une bonne part à Mike Hodgson.
Mike avait énormément de talent. J'aimais son approche du film et de son design. Il a travaillé avec Don Griffith [ci-dessous]. Le style du film est un mélange des deux. Je voulais que Taram et le Chaudron Magique soit à la fois différent, mais en même temps typique de Disney.


Par contre, vous comptiez un artiste pour le moins atypique dans votre équipe, en la personne de Tim Burton!
(rires) Il avait un grand bureau juste à côté du mien, et c'est là qu'il faisait tous ces dessins bizarres. A l'époque, il n'était pas possible de les traduire en animation tant ils étaient graphiques. Ceci-dit, il a quand même eu beaucoup d'influence sur le film, même si ce n'est pas sur un style en particulier. Il était très doué, avec une imagination débordante!

Taram et le Chaudron Magique a été produit sous la houlette conjointe de Roy E. Disney et Jeffrey Katzenberg, Comment cela se passait-il entre les deux hommes?Je connaissais Roy depuis pas mal de temps. Quand il est revenu au Studio, j'ai travaillé en étroite collaboration avec lui -beaucoup plus qu'avec Katzenberg. Roy voulait diriger le studio d'animation, et Katzenberg également, et aucun des deux ne voulait rogner sur son pouvoir. Il y a donc eu de la tension entre les deux hommes et je me suis retrouvé au milieu. Pour ma part, j'étais du côté de Roy parce qu'il avait grandi avec Walt et avait baigné toute sa vie dans l'animation. J'avais donc plutôt foi en lui sur le long terme.

Disney va éditer prochainement l'édition Diamant de La Belle et la Bête et je sais que vous avez travaillé sur la toute première version de ce film. Quels en vos souvenirs?
J'ai été assigné à La Belle et la Bête avec David Jonas, l'un des plus brillants story men du monde, et le story man et designer vétéran Al Wilson. Nous avons réalisé quelques storyboards ensemble sur ce film et participé à deux réunions préparatoires, mais Eisner ne voulait pas d'un autre conte de fées. Il voulait quelque chose de plus actuel, dans l'air du temps, avec Cindy Lauper et Billy Joel... Il voulait une histoire pour laquelle il pourrait utiliser la culture populaire. Ceci dit, j'adore La Belle et la Bête, Je pense que c'est le meilleur film que Disney a produit depuis que je suis parti!