HIGH SCHOOL MUSICAL : Entretien avec le compositeur David Lawrence
Un palmarès impressionnant qui convenait parfaitement à High School Musical…
Quel fut votre rôle dans la production de High School Musical ?
J’ai écrit la musique de High School Musical, mais aussi de la suite, High School Musical 2. Je suis aussi le compositeur, avec ma partenaire Faye Greenberg, de plusieurs chansons dans les deux films : Status Quo dans le 1 et pour le 2, la chanson de Sharpay, Fabulous et Humu Humu.
Comment avez-vous rejoint cette aventure ?
J’avais déjà fait quelques musiques pour Disney Channel auparavant : Pop Rocks et Snow, et ils m’ont demandé d’écrire la partition de High School Musical. Ils m’ont dit qu’il devait y avoir beaucoup de chansons. Je me suis dit : « des chansons ?». Ma partenaire et moi en écrivons aussi ! Et c’est ainsi qu’ils m’ont dit qu’ils avaient besoin d’une grande chanson au milieu du film dans la cafétéria du lycée et qu’ils m’ont demandé de leur envoyer un cd de nos créations en la matière. Ils ont aimé et vous connaissez le résultat ! Et dans la mesure où ils ont adoré Status Quo, ils m’ont demandé d’en écrire d’autres pour Les Cheetah Girls 2 puis pour High School Musical 2.
Le fait est que Status Quo renferme à elle seule tout le message du film.
Nous voulions écrire une chanson qui permette de raconter l’histoire et de préciser où en sont les choses à ce stade du film du point de vue des sentiments. A ce moment de l’histoire, les deux personnages principaux commencent à s’émanciper et leur exemple commence à contaminer une partie du lycée. Le propos de la chanson, c’est d’avoir le courage de ne pas faire ce qu’on attend de vous, ce qu’on a prévu pour vous, de briser ses chaînes et de s’affirmer en tant qu’individu. Mais en même temps, il s’agit de mettre la pression sur les personnages à travers le groupe qui les pousse, au contraire, à rester dans le rang. C’est ce qui fait que Status Quo est une sorte de pivot dans cette histoire.
Cela fait beaucoup de contraintes pour une chanson !
Nous avons en effet beaucoup de responsabilités : mobiliser toutes les énergies de ces personnages pour faire avancer l’histoire et la faire basculer dans une dynamique qui va les pousser à vouloir poursuivre leurs propres rêves. Dans le même temps, nous avons eu à insérer, au beau milieu de la chanson, le personnage de Sharpay qui veut que les choses restent telles qu’elles ont toujours été car c’est ainsi qu’elle peut être elle-même. C’est cette multitude d’angles différents, voire opposés qui est la base de cette chanson.
Une base narrative qui va de pair avec une approche davantage « comédie musicale » que les autres chansons du film.
Les créateurs du film nous ont dit qu’il y avait beaucoup de chansons pop avant et après la nôtre et que, si Status Quo avait bien une dimension « pop », sa structure et son traitement devaient être très théâtraux. Dans ce sens, il fallait apporter beaucoup d’attention au texte car il devait à la fois être considéré comme des paroles de chansons, mais également comme des dialogues. Pour moi, ce fut une formidable opportunité d’écrire quelque chose de pop, qui se retienne facilement, mais en même temps qui soit vraiment dramatique. De fait, nous avons pu prendre quelques libertés par rapport à la forme traditionnelle de la chanson pop en concevant six sections différentes fondues dans un même mouvement.
Considérant la complexité de la tâche, comment avez-vous travaillé avec le metteur en scène, Kenny Ortega ?
Ce fut compliqué car l’histoire, le scénario et le point de vue n’ont pas arrêté de changer. De fait, la chanson n’a pas cessé d’évoluer pendant plusieurs mois pour s’adapter aux modifications de l’histoire. A chaque fois, Kenny me disait les changements apportés à chacun des personnages et nous devions les intégrer dans notre chanson. Ce n’est qu’au moment du tournage effectif que toutes les pièces du puzzle se sont mises définitivement en place. Mais ce n’était pas fini pour autant ! Au beau milieu du tournage, les créateurs du film se sont dit qu’en plus d’un numéro de comédie musicale, il serait intéressant d’intégrer une partie dansée. Kenny m’a donc appelé pendant le tournage en Utah pour me demander d’écrire une musique de danse de 32 mesures. Nous en avons beaucoup discuté avant le tournage, mais nous n’avions ni le temps ni le budget. Et puis, finalement, c’est pendant le tournage que cela s’est décidé. Le tout a ensuite été remonté et ce que vous pouvez voir maintenant dans le film est une version de 16 mesures de cette musique. Ce passage s’enchaîne alors sur une autre section, puis sur un hommage à Queen (Bohemian Rhapsody), puis sur le refrain final. Ce fut vraiment génial de travailler sur cette chanson !
Comment s’est passée la production de la partie vocale de Status Quo ?
Ce fut la partie la plus difficile à mettre en place car, en dehors du pont en huit mesures de Sharpay au milieu de la chanson, aucun des rôles principaux ne chante. Ce sont tous des personnages secondaires dont on ne sait pas grand’ chose dans le film. Notre tâche a donc été de faire un titre accessible et excitant avec des personnages qu’on ne connaît pas et qu’on ne retrouvera après. Il fallait donc y mettre l’histoire de chacun. Nous avons donc réuni un ensemble assez important de chanteurs : 12 jeunes, auxquels nous avons ajouté d’autres chanteurs pour le refrain, avec notamment trois leaders. Zeck, le joueur de basket ball, Martha Cox, l’intello, et le surfeur, que nous avons castés séparément. D’habitude, ils chantent en tant que chœurs (background singers), mais là ils prenaient le devant de la scène. Ce fut l’un des enjeux de cette chanson : comment rendre intéressants pour eux mêmes et pour l’histoire ces personnages secondaires ?
Comment travaillez-vous avec votre partenaire, Faye Greenberg ?
Cela fait longtemps que nous travaillons ensemble ce qui fait que les choses se passent de façon très naturelle. En fait, la majeure partie du processus démarre à partir des paroles écrites par Faye. Ce n’est qu’ensuite que nous travaillons à l’aspect musical. Sur Status Quo, il y eut beaucoup de modifications à faire, peu sur le plan musical (si ce n’est la musique de danse), davantage du point de vue des paroles, afin de s’adapter au mieux aux changements de l’histoire.
Pouvez-vous nous parler de la musique du film ?
La majeure partie de cette partition est typiquement dans le style d’une comédie romantique mais nous avons dû faire attention à ne pas être ni trop sophistiqués, ni trop simples. Les sentiments exprimés dans le film sont des sentiments liés à l’amour et au désir de poursuivre ses rêves. Il ne fallait pas les traiter de façon simpliste. J’ai donc opté pour une approche traditionnelle en ce qui concerne les scènes clefs de présentation des personnages principaux, si ce n’est que j’ai pris quelques libertés avec le personnage de Sharpay du fait qu’elle est à la fois la « méchante » et drôle. Pour elle, j’ai fait appel à des éléments plus contemporains à travers la guitare et le rythme. Et plus tard dans le film, alors qu’on se dirige vers le climax, j’ai incorporé beaucoup d’éléments « pop » et groove derrière l’orchestration symphonique. Ainsi, à mesure que la musique accélère, j’ai utilisé des rythmes rapides aux cors et des cordes martelées pour souligner le beat électronique et la basse. J’ai ainsi voulu marier la jeunesse et l’énergie des acteurs à des éléments traditionnels au genre de la comédie romantique. C’est une sorte de synthèse de l’ancien et du moderne.
Comment avez-vous abordé cette partition du point de vue des thèmes ?
Ce fut assez particulier. D’habitude dans une comédie musicale, la musique reprend les thèmes des chansons. Mais dans la mesure où la plupart des titres sont plus des grooves que de véritables mélodies, ce fut plus compliqué d’utiliser la technique du leitmotiv. Ceci dit, certaines chansons comme la première du film, The Start of Something New, sont plus mélodiques. Il y a donc deux ou trois scènes pour lesquelles j’ai pu reprendre des portions de cette mélodie et en faire une musique.
Cela a dû vous obliger à composer vos propres thèmes instrumentaux…
Absolument. C’est la raison pour laquelle j’ai créé quatre thèmes originaux pour accompagner certains personnages.
A quel type d’orchestre avez-vous fait appel ?
Pour la musique du film, j’ai utilisé un orchestre symphonique classique composé de cordes, cors, clarinette, hautbois et flûte associé à un piano, des percussions et une harpe. Il s’agissait d’un petit ensemble, mais du point de vue de l’orchestration, j’ai écrit pour lui comme s’il s’agissait d’un orchestre de 100 musiciens. Pour Status Quo, ce fut l’inverse dans la mesure où là, la base était pop : piano, basse, batterie et guitare agrémentés d’éléments de synthétiseur, avec les voix greffées par-dessus. Ce film est vraiment un pot-pourri de différents styles. On peut y trouver d’un côté des morceaux magiques basés sur un chœur et un orchestre en pizzicati et de l’autre des choses très groovy avec une ligne de basse très pulsée, en passant par la comédie musicale traditionnelle. C’est une diversité qu’on ne trouve que très rarement sur ce genre de film, ce qui fait qu’il a constitué pour moi un véritable défi et que je suis très heureux du résultat.
Que représente votre expérience sur High School Musical sur le plan professionnel et sur le plan personnel?
Professionnellement, cela a permis à Faye et à moi de nous faire connaître d’un public beaucoup plus large, auditeurs et professionnels, et de travailler sur d’autres projets de ce type comme les Cheetah Girls. Et personnellement, ce fut fantastique car j’ai une fille, Mable, qui a dix ans et demi, c’est à dire l’âge idéal pour ce genre programme. Ce fut merveilleux pour Faye et moi de pouvoir travailler sur un projet que notre fille pouvait apprécier. Imaginez sa fierté de dire : « c’est ma maman et mon papa qui ont fait High School Musical ! » C’est une grande fierté pour nous en tant que parents d’avoir pu travailler sur quelque chose qui a apporté autant de plaisir aux jeunes et à leur famille.
Comment les choses vont-elles évoluer sur High School Musical 2 ?
High School 2 est une sorte de High School 1 avec une dose massive de stéroïdes ! On passe à un niveau supérieur dans la mesure où les jeunes sont un peu plus mûrs et où les chansons sont incroyablement plus importantes et plus fantastiques pour les yeux et les oreilles. Il nous a vraiment fallu, à nous tous compositeurs, nous retrousser les manches pour faire quelque chose d’encore meilleur sur le plan créatif. Prenez Fabulous. C’est une chanson très théâtrale, mais aussi encore plus pop. Il y a quelque chose de Madonna, avec une touche de Popular dans Wicked en termes de paroles, sur une musique vraiment très pop et très rythmée. Quant à Humu Humu, c’est une sorte de chanson polynésienne qui part dans tous les sens en termes de folie. Nous avons vraiment eu carte blanche pour être les plus créatifs possible. Les nouvelles chansons sont meilleures, plus ambitieuses, plus flamboyantes et vous restent tout autant dans l’oreille !
Pouvez-vous nous dire quelques mots sur Jericho, qui va être diffusé prochainement sur nos petits écrans ?
Il faut vraiment voir cette série car c’est un programme vraiment excellent !
Aux dernières nouvelles, le tournage d’une seconde saison était plus qu’incertain…
Il s’est passé quelque chose de magique et d’historique. A la fin de la première saison, la chaîne CBS a décidé de ne pas reconduire la série pour une deuxième saison. Or, dans les trois semaines et demie qui ont suivi l’annonce de cette décision, des milliers de fans ont envoyé des lettres via internet à la chaîne pour les faire changer d’avis. Plus encore, à la fin de la saison, l’un des derniers mots de l’un des personnages principaux est « cacahuètes ». Je ne peux pas vous révéler pourquoi car ce serait trop en dire et ne pas vous laisser la surprise… Tout ce que je peux dire, c’est que ce mot a ici un sens différent de son sens de base et revêt de fait une dimension symbolique très importante pour les millions de fans qui ont suivi la série. Eh bien tous ces gens ont envoyé 25 tonnes de cacahuètes à la chaîne, avec des lettres passionnées demandant de ne pas supprimer la série ! C’était l’un des programmes les plus excellents qu’ils avaient jamais vu et c’est tellement rare que quelque chose d’aussi bon sorte sur les écrans qu’il ne fallait pas le sacrifier. Et pour la seconde fois dans l’histoire de la télévision, la chaîne a plié et a décidé de relancer la série après l’avoir annulée !
Quel type de partition avez-vous conçu pour cette série ?
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’une partition très différente de celle de High School Musical. La série se situe dans une Amérique post-apocalyptique, après une guerre nucléaire. La musique est un mélange de grand orchestre avec des cordes très staccato et des cuivres très rythmés et de rythmes groove, transes, électroniques qui propulsent la partie symphonique. Et en marge de cela, on trouve des moments très « americana » à la Aaron Copland, avec de petits ensembles instruments, et notamment le fiddle, associé à des textures atmosphériques. C’est une énorme responsabilité car la musique est devenue un personnage à part entière de la série en tant que moteur et en tant que soutien des personnages. Chaque épisode dure entre 43 et 44 minutes, et la musique dure autant ! C’est à la fois un challenge et un plaisir d’avoir une telle opportunité !
Avez-vous fait appel à un orchestre live ?
Cela sonne comme un orchestre live, mais ce n’est pas le cas. J’espère que, maintenant que la deuxième saison est lancée, nous aurons un budget pour incorporer davantage d’éléments live. Pour l’heure, il s’agit principalement de samples avec seulement quelques musiciens solistes que j’ai enregistrés dans mon studio.
Cela ne peut que nous donner encore plus envie de découvrir cette série !
Vous pouvez : c’est de la grande télévision !
A bientôt donc, que ce soit à East High ou à Jericho !
Ce fut un plaisir que d’en parler avec vous et je suis extrêmement flatté de votre intérêt !
With very special thanks to Fred Mollin and Dani Markman (Walt Disney Records)
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