mardi, février 06, 2007

PIRATES OF THE CARIBBEAN : Souvenirs de l'imagénieur Marc Davis

La création de l’attraction Pirates of the Caribbean est une aventure en elle-même. L’idée en remonte à la fin des années cinquante, mais le projet ne prit corps que lorsque le regretté Marc Davis, l’un des fameux Nine Old Men, prit le projet en main en compagnie de Claude Coats. Tous deux venaient de l’animation. Si l’on doit à Claude Coats parmi les plus beaux décors de Disney, de BLANCHE-NEIGE ET LES SEPT NAINS à LA BELLE ET LE CLOCHARD, on connaît Marc Davis pour son animation éblouissante de Fleur dans BAMBI, et d’Alice (« La Partie de Thé »), mais surtout de Clochette (PETER PAN), Aurore et Maléfique (LA BELLE AU BOIS DORMANT) et Cruella (101 DALMATIENS). Débutant en 1935 chez Disney, il devient imagénieur en 1962, date à laquelle Walt lui demande de repenser certaines attractions de Disneyland comme le Mine Train Through Nature’s Wonderland. Il travaille également à la conception des personnages sur G.E.’s Carousel of Progress, Great Moments With Mr. Lincoln et It’s A Small World pour la New York’s World Fair de 1964-1965. Mais ses créations les plus célèbres demeurent à tout jamais Pirates of the Caribbean et The Haunted Mansion.


Dans son ouvrage Walt Disney’s Nine Old Men and the Art of Animation, John Canemaker nous rapporte que Walt disait de lui en 1965 : « Je n’ai pas utilisé Marc comme je l’aurais dû. J’ai là-bas tout un bâtiment rempli d’animateurs qui ne savent faire que ça. Marc, lui, sait inventer des histoires et des personnages, il sait animer et il sait concevoir le design des attractions pour moi. Je n’ai qu’à lui dire ce que je veux et c’est fait. C’est mon homme de la Renaissance. »
Pour le Pirates of the Caribbean original, au New Orleans Square de Disneyland, il a réalisera des dizaines de dessins de pirates définissant la plupart des personnages hauts en couleurs que l’on retrouve dans l’attraction, de la mouette rieuse aux trois prisonniers qui essaient d’amadouer le chien qui a les clefs de leur cellule, en passant par la vente aux enchères. On lui doit également la conception de la version de Walt Disney World (1973), mais surtout l’humour délicieux qui parcourt toutes ces attractions, d’Anaheim à Tokyo, en passant par Paris.

Voici comment il racontait cette aventure :
« Quand j’étais à WED (aujourd’hui Walt Disney Imagineering, JN), un jour, Walt est venu me voir et m’a dit ‘Dis-moi, Marc, il y a quelque chose que j’aimerais faire, une attraction sur les pirates’. Et il ajouta : ‘Pourquoi pas les pirates des Caraïbes ?’ A cet instant, il avait trouvé le nom ! Je travaillais alors sur d’autres choses, mais je me suis alors dit : ‘ hey, c’est vraiment intéressant !’. C’est ainsi que j’ai commencé à travailler là-dessus. Pendant que je travaillais, Walt venait dans mon bureau, mais je n’arrivais pas à lui faire regarder mes esquisses. Il venait et me parlait, c’est tout. Cela a duré un certain temps et c’était extrêmement frustrant. Mais Walt se promenait beaucoup dans les bureaux et je suis sûr qu’il avait vu ces concepts en dehors des heures de travail. Il a toujours fait cela.



A l’origine, l’attraction devait être une promenade sous New Orleans Square qu’on était en train de creuser à cette époque. J’ai donc conçu une promenade et fait un dessin de ce à quoi l’ensemble aurait pu ressembler. » L’attraction, alors nommée Thieves Market (le marché des voleurs) était sensée se composer de personnages de cire et de scènes diverses réparties à l’intérieur des maisons entourant deux places de village reliées par un bateau pirate.


« Puis il y eut la Foire Internationale de New York ». C’est à cette occasion que Walt Disney et WDE eurent l’occasion de concevoir et de réaliser les attractions les plus innovantes du moment, basées sur le dernier cri en matière d’audio-animatroniques comme Great Moments with Mr. Lincoln, le Carousel of Progress et bien sûr It’s A Small World, qui se doublait d’un parcours en bateau. Walt ne pouvait manquer de faire appel à cette nouvelle technologie et à ces nouvelles idées pour ses futures attractions.


« Quand elle fut finie, Walt savait exactement ce qu’il voulait faire. Il est donc revenu me voir -c’était après que j’eus conçu toute la promenade souterraine- et m’a dit : ‘ Mets un bâtiment au-delà du ponton et on fera un voyage jusque là’. Cela réduisait tout ce que j’avais fait à néant, et c’est là que les squelettes sont apparus. Ce devait être une sorte de reconstitution historique ainsi que quelque chose de magique. Le parcours devenait plus étroit et finalement, on accédait au ponton. On devait partir et bang, c’était gigantesque ! Vous n’aviez aucune idée d’où vous étiez -c’était le point important- puis vous deviez faire le tour de tout cela.
Claude Coats, qui était diplomé en architecture de USC, était très bon pour réaliser les layouts d’un parcours et ce genre de choses. C’est ainsi qu’il fit partie du projet. Il y avait aussi beaucoup d’autres personnes qui étaient expertes chacune dans sa spécialité.
J’ai imaginé chaque scène à mesure que nous progressions et créé chaque personnage.
Il est probable qu’aucune attraction de ce type, ou qu’aucune attraction en général n’ait été visitée par autant de gens que Pirates of the Caribbean. Je suis très flatté d’y avoir participé.
»


Propos de Marc Davis reproduits avec l’aimable autorisation de Rick West (Theme Park Adventure).